Wilmer Wise
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31 jan. 2015
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21 décembre 1936, Philadelphie – 31 janvier 2015, New York
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© Jazz Hot n°670, hiver 2014-2015
Le trompettiste classique Wilmer Wise est décédé
après une lutte contre le cancer (diagnostiqué en 2014). C'était un musicien
très apprécié du monde trompettistique : « He was a
pioneering black trumpeter in the world of classical music »
(Wynton Marsalis, 2 février 2015). Après, notamment, Joe Wilder,
son rôle historique fut, en effet, d’être l’un des premiers
artistes de sa communauté à s’imposer et faire carrière dans les
orchestres symphoniques américains. A l’inverse d’un Joe Wilder
puis d’un Wynton Marsalis, il ne laisse pas de disque en tant que
soliste classique (ni comme soliste jazz). Son travail remarquable
comme l’a souligné Leonard Bernstein lors d’une répétition
filmée de West Side Story,
fut celui d’un « genious first trumpet player » donc
ignoré de ceux qui ne jurent que par le solo ! Il a abordé la
trompette dès l’âge de 8 ans (notons que sa mère fut
trompettiste !) et il a acquis des bases classiques on ne peut
plus solides auprès, notamment, de Sigmund Hering, Gilbert Johnson,
Samuel Krauss et Nathan Prager, rien moins ! Dès 1960, il est
premier trompette au Schubert Theatre de Philadelphie et il joue le
Concerto
de Haydn avec le Philadelphia Orchestra dirigé par David Amram. En
parfait musicien classique, c’est avec une trompette en ut (!)
qu’il a l’occasion de jouer en pupitre la même année, pour
Quincy Jones (aux côtés de Freddie Hubbard et Benny Bailey). Bien
sûr, originaire de Philadelphie, il a joué dans des marching bands
et big bands locaux, et y a connu Lee Morgan, Johnny Coles, Lamar
Wright Sr, et bien d’autres artistes catalogués jazz pour lesquels
il avait amitié et respect. Mais ses titres de gloires furent acquis
au sein de l’Orchestre de Marlboro (avec Pablo Casals ;
festivals, tournée européenne –avec Rudolf Serkin-, disques dès
1965), du Symphony of the New World dirigé par Benjamin Steinberg
(1965, il joue Dvořák et Stravinsky), du Brooklyn Symphony
(titulaire en 1968-2003) et dans des shows de Broadway (à
partir de 1971) : Lovely Ladies and
Kind Gentlemen, Oh
Kay, Jerome
Robbins’ Broadway, Into
the Woods, etc. Il a participé
à la création de The Sacred Mind of Johnny Dolphin for trumpet,
string quartet and percussion d’Ornette Coleman (1974).
Il
fit des remplacements au sein du Thad Jones-Mel Lewis Big Band. Ses
compétences techniques lui ont permis une activité dans les studios
d’où sa participation (parfois anonyme) aux productions les plus
variées : Philip Glass, Weather Report (novembre 1971, tp
piccolo : ‘unknown soldier’, Columbia), Leonard Bernstein (West
Side Story, Wise, tp1, Phil Ruecktenwald, tp2, Dave Gale, tp3),
David Amram (1972, Subwey Nights avec Joe Wilder, Marky
Markowitz, Thad Jones, tp), Sir James Randolph (avec Victor Paz,
Johnny Grimes, tp, Julius Watkins, cor, Quentin Jackson, tb, Luck
Be a Lady), Crazy for You (Original Broadway Cast),
Assassins (Orignal Broadway Cast), Sondheim : Into the
Woods (Original Cast Recording), Stanley Clarke. C’est
lui que l’on entend dans une séquence du film Kramer
versus Kramer de Robert Benton (jouer à
la tp piccolo la Sonata
de Purcell, 1979). Il a bien sûr enseigné à la Morgan State
University et au Peabody Conservatory. Wilmer Wise a beaucoup
fréquenté les conférences de l’International Trumpet Guild.
Estimé des avant-gardistes Dave Douglas, Taylor Ho Bynum, Wilmer
Wise a poursuivi jusqu’à son décès une activité diversifiée :
quintet de cuivres (avec Jerome Ashby, cor), Harlem Chamber Players,
JMIH Orchestra dirigé par Loren Schoenberg (novembre 2012), Imperial
Brass Band (février 2013). Il a joué en décembre 2012, le Concerto
Opus 35 de Chostakovitch (Antara
Ensemble) et le Concerto P75
de Vivaldi avec Donna Rossi (tp2) et le Brooklyn Community Wind
Ensemble.
Wilmer Wise avait noué une solide amitié avec Ted Curson,
Jimmy Owens, Joe Wilder, Warren Vaché, mais il a lui-même dit avoir
forgé son style de trompette sous l’influence de Gilbert Johnson,
Harry Glantz, Irving Berger et Samuel Krauss. Sur le plan humain,
nous avons correspondu avec un Wilmer Wise très abordable et
toujours prêt a apporté son témoignage sur la multitude
d’artistes, parfois obscures, qu’il a connu.
Michel Laplace
Source :
Le Monde de la trompette et des cuivres, des origines à 2014
(classique, variétés, jazz)
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