Philippe Fréchet est aujourd'hui à la tête de la « Petite Université Populaire Arize
Lèze », en Ariège, dont il évoque l’existence avec
un enthousiasme communicatif :
« Aux
amis de la philosophie, de l’histoire, de la littérature, des
sciences, des arts... A toutes celles et tous ceux qui aiment
bien comprendre... La PUPAL, née en février 2010, est Petite, parce
qu’elle se veut modeste, sans prétention et à taille humaine ;
Université, parce que c’est un lieu de rencontre, d’échanges et
d’accès aux connaissances ; Populaire, parce qu’elle est
ouverte à toutes et à tous, sans restriction ; en Arize-Lèze,
parce que nous nous réunissons dans des communes accueillantes de
ces deux vallées ou des coteaux qui les surplombent (Sieuras,
Castex, Campagne s/Arize, Loubaut, Le Fossat, Le Mas d’Azil, Lézat,
Saint-Ybars...).
Il
s’agit, pour nous, d’apprendre ensemble et d’échanger des
connaissances et des réflexions, autour de la philosophie et de
l’histoire, des arts et de la littérature, des sciences, de la
politique et des questions de société...
L’accès
à la « Petite Université Populaire Arize-Lèze » est
entièrement libre et gratuit, y compris pour ceux et celles qui
n’ont pas participé aux séances précédentes et sans obligation
d’adhésion. Il n’est nul besoin d’être intellectuel,
spécialiste (philosophe, historien, économiste, artiste ou autre)
ou diplômé de quoi que ce soit pour venir : les interventions
et discussions sont accessibles à tout un chacun... »
Passionné
par les rapports entre jazz et littérature, Philippe Fréchet a
donné sur ce sujet des conférences à travers la France depuis
1993, dont un surprenant colloque autour du philosophe
franco-néerlandais Pierre Bayle (1647-1706), pour l’université
Montesquieu (Bordeaux IV) : Pierre Bayle et la pensée
politique de son temps, en 2010, où il avait invité le
saxophoniste Jean-Louis Chautemps à proposer une performance mettant
en lien jazz et philosophie. « Descartes, oui, mais des
quartes augmentées ! » s’écriait le lecteur sous
les improvisations du ténor, devant un public médusé. De lectures
publiques en conférences, le jazz n’est jamais loin à
travers son programme « Jazz en pages » et le cycle
intitulé « Pour une petite histoire du jazz » accompagné
d’un diaporama.
Ce
qui nous amène à cette entrevue c’est bien entendu la création
et la direction, pour les éditions du Limon à Montpellier, puis
Paris, de la collection Mood Indigo dans laquelle
douze monographies de musiciens de jazz et de blues ont été
publiées de 1989 à 1996 ; avec trois prix de l’Académie du
jazz (1990,1992,1994) pour le Lennie Tristano de François
Billard, le Django Reinhardt de Patrick Williams (également
Django d’or 1992), le Bessie Smith de Florence Martin, sans
oublier le Chet Baker de Gérard Rouy (Django d’or 1993). Il
faut dire que Philippe Fréchet avait déjà commis ses premiers
articles dans la revue Jazz, Blues and Co de 1975 à 1980. Il
récidive plus tard, de façon sporadique, pour la revue Improjazz
et les Cahiers du jazz, en développant son goût pour les
articles de fonds.
Depuis
1996, il dirige le domaine « Jazz, blues et musiques
improvisées » de la collection Eupalinos des éditions
Parenthèses à Marseille. Une activité dont il parle avec ferveur
« On a publié douze livres et on s’apprête à sortir à
l’automne la réédition du West Coast Jazz d’Alain
Tercinet ainsi que le livre d’Alexandre Pierrepont : L’AACM,
un jeu de société musical(e) ».
« On
a pu également rééditer certains titres de la collection Mood
Indigo, comme le Django de Patrick Williams qui avait
été épuisé en deux ou trois ans. Il est ressorti quasiment tel
quel, sans aucune modification de l’auteur, dont nous avons publié
un autre livre sur Django, plus onirique, relevant davantage de la
fiction. On a aussi failli republier le John Coltrane de
Xavier Daverat, mais finalement, lorsqu’il a retravaillé son
livre, il a en a fait une œuvre totalement différente, Tombeau de John Coltrane. Tombeau dans le sens poétique du
terme : qui honore la mémoire.
On a également réédité des
bouquins épuisés de la collection Epistrophy comme Le
Cas Coltrane d’Alain Gerber, Lady Sings the Blues,
l’autographie de Billie Holiday.
La création est aussi présente à
travers le roman Noir, la neige de Pascal Rannou. Au départ,
j’étais assez réservé sur le roman car ce n’était pas mon
domaine de prédilection. Je suis directeur de collection d’essais,
le roman, c’est autre chose, un autre type de travail et d’écriture
que je n’ai jamais abordé. L’histoire est celle d’une
trompettiste de jazz qui a réellement existé, Valaida Snow
(1904-1956), évidemment peu connue du grand public, mais qui mérite
de l’être. J’ai trouvé intéressant que l’auteur l’aborde
sous la forme d’une fiction, un peu dans la lignée de ce que fait
Alain Gerber chez Fayard. Il faut dire que l’existence de Valaida
Snow s’y prête à merveille ; ce personnage ayant côtoyé Fletcher
Henderson, Earl Hines, Count Basie, Bill Coleman, Chick Webb et
Django. »
Si
Philippe Fréchet se passionne pour le travail des auteurs, il
n’envisage pas de publier lui-même : « Personnellement,
cela ne me tente pas. J’écris des articles de fond sur la
littérature, la philosophie, une espèce de compilation de travail
de lecture et d’écriture. Ecrire un roman ou un essai ne m’a pas
encore titillé ! ».
Reste
la musique, qui est également au centre de ses préoccupations,
puisqu’il a participé au début de l’aventure du festival Jazz à
Foix avec son ami Eric Baudeigne : « J’habite dans le nord
de l’Ariège, pas très loin de Toulouse. Je n’y vais d’ailleurs
pas spécialement pour y écouter du jazz. Le jazz, on peut aussi le
déguster chez soi. Lorsqu’on me demande si je suis musicien, je
réponds que je suis un excellent joueur de CD player (rires). Dans le monde de la musique, il y a les musiciens
mais il faut aussi des amateurs, comme moi, qui les écoutent avec
passion. Sans quoi, ils disparaîtraient. Cela se vérifie aussi avec
la littérature ».
Aujourd’hui,
Philippe Fréchet se demande si les écrivains ne vont pas devenir
plus nombreux que les lecteurs, malgré la présence de nombreux
étudiants dans les bibliothèques, lui qui redécouvre en ce moment
des auteurs classiques, Zola ou Maupassant mais aussi Mo Yan
(prix Nobel de littérature 2012) : « On est bien loin du
jazz ! En ce qui concerne la musique, j’ai beaucoup aimé un
disque du saxophoniste Olivier Temime, mais, en général, je vis un
peu sur mes réserves : Mingus, le Vienna Art, des musiciens que
j’ai vu et côtoyé dans les festivals. Je vis dans un village qui
s’appelle le Carla Bayle et mon rêve et d’y faire venir le big
band de Carla Bley (rires) ».
Contact
http://pupal09.blogspot.fr
ph.frechet@gmail.com
Philippe Fréchet : un
CV Jazzolittéraire
Collection Mood
Indigo (1989-1996)
Lennie Tristano, par
François Billard
Ella Fitzgerald, par Alain
Lacombe
Charles Mingus, par
Christian Béthune
Stan Getz, par Alain
Tercinet (épuisé)
Django Reinhardt, par
Patrick Williams (réédité chez Parenthèses)
John Lee
Hooker, par Gérard Herzhaft (épuisé)
John Lewis, par Thierry
Lalo
William Breuker, par
Françoise et Jean Buzelin
Chet Baker, par Gérard
Rouy (épuisé)
B.B.
King, par Sebastian Danchin
Bessie Smith, par Florence
Martin
John Coltrane, par Xavier
Daverat (épuisé, en cours de réédition chez Parenthèses)
Collection Eupalinos des éditions Parenthèses
Sidney Bechet, par
Christian Béthune
Parker’s Mood, par Alain
Tercinet
Django, par Patrick
Williams (réédition augmentée)
Brasil : A musica,
panorama de la musique populaire brésilienne, par Jean-Paul Delfino
Fonctions sociales du
blues, par Robert Springer
La France du jazz, par
Denis-Constant Martin et Olivier Roueff
Le Champ du jazz, par
Alexandre Pierrepont
Lady
Sings the Blues, par Billie Holiday & William Dufty (réédition)
Le Cas Coltrane, par Alain
Gerber (réédition)
Rire pour ne pas pleurer,
par Jean-Paul Levet (ouvrage de photos avec textes de blues traduits,
hors collection)
Noire, la neige, par
Pascal Rannou (roman)
Tombeau de John Coltrane,
par Xavier Daverat
A paraître :
West Coast Jazz, par Alain
Tercinet (réédition augmentée)
L’AACM, un jeu de
société musical(e), par Alexandre Pierrepont