Louis Mazetier
Docteur Jazz
Depuis
1977, Louis Mazetier circule dans les lieux du Paris Stride. Qui a
fréquenté ces clubs, n’a pas manqué de rencontrer sa silhouette
d’adolescent en quête d’un clavier disponible pour, avec son copain François Rilhac, mettre le feu à l’endroit. Leur duo de
piano faisait les beaux soirs de parties prisées de la capitale mais
surtout d’ailleurs en France. Après
la mort de François Rilhac, Louis continua sa route seul pendant
plusieurs années, mais également en compagnie du Gilbert Leroux
Washboard Group, du trio de Patrick Saussois, avec le Paris Washboard
surtout depuis plus de vingt-cinq ans et ces dernières années au
sein d’autres formations avec Michel Pastre, Jérôme Etchéberry… Louis
Mazetier a eu un parcours original : médecin reconnu, il est
également un pianiste de talent. Maintenant âgé de 55 ans (il est
né le 1er
février 1960 à Paris), ce Corrézien accomplit depuis trente huit
ans ses deux brillantes carrières dans sa ville natale
Maintenant
reconnu dans l’univers du jazz classique, il ne se produit plus
dans les endroits confidentiels de ses débuts. Il est invité à
l’étranger, joue sur les grandes scènes internationales et dans
les festivals de jazz, apprécié de ses pairs de ceux qui avaient
été ses maîtres et ses modèles, avec le secret espoir qu’un
jour les côtoierait. Il
nous fait le récit de ce parcours étonnant.
Propos recueillis par Félix W. Sportis photos Félix W. Sportis
© Jazz Hot n°671, printemps 2015
Jazz Hot : On
t’a enfin découvert ces dernières années. Néanmoins, veux-tu te
présenter ?
Louis
Mazetier : Je suis né
à Paris dans une famille bien établie. Ma mère, secrétaire qui a
toujours vécu à Paris, était de parents lyonnais. Mon père, fils
d’instituteur creusois très IIIe
République, l’a rencontrée à la fin de ses études de médecine
qu’il faisait à Paris. Six mois après ma naissance, notre famille
est partie à Ussel (Corrèze), puis à Tulle. Mon père était
chirurgien. Il a commencé sa carrière dans des cliniques du Centre
de la France, sa région natale. En 1966, il y a fait construire une
clinique dont ma mère est devenue directrice jusqu’à sa retraite.
J'ai donc vécu ma jeunesse dans la Creuse où j'ai fait mes études
et passé mon bac en 1977. Notre famille s'est agrandie d'une petite
sœur, ma cadette de cinq ans, qui est devenue avocate. J'avais
choisi de faire médecine. Comme j'étais trop jeune quand j’ai eu
mon bac, et comme je dépendais de Limoges, mon père, qui ne pouvait
envisager d'études de médecine qu'à Paris, m'a demandé de faire
une Math Sup à Stanislas à Paris en attendant d'entrer à la fac de
médecine de Paris si... Je suis passé en Math Spé, mais ce n'était
pas mon truc. J’ai donc changé d’orientation et suis entré en
médecine à La Pitié-Salpetrière, ma famille continuant à résider
en Creuse. J'ai donc vécu seul à Paris depuis 1977.
C'est
donc une famille de la petite bourgeoisie qui a connu une belle
promotion sociale.
Effectivement.
J'ai commencé le piano à 7 ans. Nous avions un piano à la maison
près d'Aubusson. Ma grand-mère maternelle avait joué du piano ;
très bien, mais elle s'était arrêtée à cause d'une arthrose.
Elle en avait conservé une oreille très fine ; elle avait
l'oreille absolue ! Comme ma maîtresse disait que je chantais
bien et que j'entraînais les autres, on a donc décidé de me faire
étudier la musique. Comme il n'y avait pas de conservatoire, on m’a
cherché un professeur de piano et on m’a trouve un accordéoniste
de bal, Jean Mallet, un type extraordinaire. C'est à son
obstination, tant auprès de mes parents que de moi-même – car,
crois-moi, je n'étais pas facile à convaincre – que je dois
d’avoir fini par m'intéresser à la musique ! (Rires)
Rends-toi compte, il venait me chercher à l'école pour m'amener
faire une heure de piano chez lui ! Or moi, je t’assure que ça
ne m'intéressait pas du tout. Au bout de trois ou quatre ans, à
raison d'une heure par semaine, je ne jouais que la « Lettre à
Elise », ce qui n'est pas terrible, tu en conviendras !
Cependant, il avait remarqué que je le bernais : je ne savais
pas lire la musique. Il suffisait qu’il me joue une fois les
exercices, juste avant pour les reproduire, les rejouer sans
travailler, sans apprendre ! Il a donc beaucoup insisté auprès
de mes parents pour que je continue. Il s'était parfaitement rendu
compte que j'avais de la feuille. Pourtant j'aimais bien la musique ;
mais l'étude était un calvaire, ce n'était pas possible ! Je
n'ai jamais pu jouer de musique classique parce que je n'ai jamais pu
m'empêcher de faire des substitutions. Il m'est impossible de
respecter le texte exact d’une partition, de musique classique,
s'entend.
Alors
comment as-tu dépassé ton aversion ?
Au
début de 1970, je suis allé au cinéma avec ma mère aux Sables
d'Olonne ; en Vendée, voir Borsalino.
J'ai trouvé la musique de Bolling formidable. Mais personne ne
pouvait me renseigner sur ce type de musique. Personne, dans la
famille, ne connaissait le ragtime. Un jour, deux cousins de la
famille Cohen, dont les parents étaient amis des miens, sont venus à
la maison, et ils ont joué des ragtimes à quatre mains sur mon
piano. La mode était revenue de cette musique avec le film
L'Arnaque.
Je me suis alors rendu compte qu'on pouvait jouer de la musique en
s'amusant. J’ai trouvé quelque chose qui me plaisait dans ce
rythme. C’est ainsi que je me suis mis à improviser sur les
quelques morceaux que j'avais pu péniblement apprendre, « Lettre
à Elise », « La Marche turque » et quelques autres
morceaux de musique simplifiée que j’avais travaillés. Un kiné,
qui travaillait à la clinique de mon père, Bertrand, invité à
dîner à la maison, m'a entendu et m'a dit : « Tu as une
bonne main gauche, il faut que je te fasse écouter du jazz ».
« Du jazz ? Sûrement pas ! Pas question ! J'en
entends à la radio, c'est une horreur ! », lui ai-je
répondu. (Nous étions en pleine période free (rires).
Mais il a insisté : « Non, mais ce n'est pas le même, tu
vas voir. » Et
la semaine suivante, il est revenu avec un disque Musac de Fats
Waller en solo. J'ai eu du pot ! (Rires)
Il m'avait également apporté un disque d'Armstrong avec Earl
Hines ! (Rires)
Il ne pouvait pas tomber mieux. J'ai gardé les disques pendant six
mois. J'ai appris le disque de Fats par cœur, et je le jouais comme
on fait une copie. Au bout de six mois, il a été foutu : je le
passais sans arrêt ! J'avais des moyens techniques très
rudimentaires et frustres, je n'avais jamais appris la moindre
technique du piano ! Il y avait des choses que je ne savais
pas ; je n'avais jamais imaginé qu'on puisse faire des 10°.
Quand j’y repense… Le résultat était surprenant ; pendant
un temps, par exemple, je faisais le stride
à l'envers. Vers 12 ans, je jouais donc du Fats simplifié. Mais, le
plus terrible, c’est que je ne décollais plus du piano ! Il
fallait qu'on me rappelle à l'ordre pour travailler ! Ce fut le
début d'une passion. Bien qu’un peu vexé de ne pas avoir
découvert ce qui aurait pu m'intéresser, Mallet était très
content. Et il a même été super. Car il a accompagné ma démarche.
Il a fait acheter les quelques partitions de ragtime et de jazz,
qu'on pouvait trouver à l’époque par mon grand-père à Paris. Je
te rappelle qu’à l’époque il n'y avait pas grand-chose :
quelques pièces de Jelly Roll, quelques-unes de Fats… Nous
n’avions pas encore les transcriptions mais des versions
simplifiées. On a donc travaillé ces partitions et surtout la mise
en place. Car en tant que musicien de bal, il connaissait la
question. Même si le tempo était encore fluctuant, il était
exigent et ne laissait rien passer, pas même un temps !
Crois-moi !
Ces
années d’apprentissage ont donc été difficiles.
Oh,
oui ! Car il y avait des trucs difficiles à réaliser pour la
mise en place. J'envoyais mon grand père trouver les disques des
pianistes de jazz, j'avais trouvé un livre sur le jazz d’Hugues
Panassié et Madeleine Gauthier… Parce que j'apprenais aussi tout
seul avec les disques RCA de Fats, les MCA de Tatum, les albums
d’Earl Hines… Je suis très enraciné dans le jazz traditionnel ;
ce furent mes vrais débuts. Cependant, je n'ai pas fait beaucoup de
ragtime parce que ça m'ennuyait un peu ; c'est moins musical.
J'ai immédiatement préféré le swing et l'improvisation de Fats et
des autres, leurs développements harmoniques d’une grande
richesse. Je suis resté très proche de ces grands pianistes, Fats,
Hines, « The Lion » ; je n'ai vraiment pigé Tatum
que deux ans après. Et je continue toujours à le découvrir ;
je l’écoute plusieurs fois par semaine. Je me pose peut-être
moins de questions sur sa manière de jouer mais j'y trouve plus de
mystère maintenant. D’ailleurs, les pianistes qui m'intéressent
le plus maintenant sont ceux qui sont mystérieux par leur son, par
leurs idées, par leur mise en place, leur à-propos… Je te parle
des pianistes mais cela concerne aussi les autres musiciens. Les
pianistes magiques pour moi, Tatum, Jimmy Rowles, James P., Duke,
celui d’après 1953, même James P. et Willie « the
Lion »…qui ont un son et même si tu joues exactement les
mêmes notes qu’eux, tu ne parviendras pas à obtenir le même
résultat. C'est le mystère ! Fats me paraît moins
imprévisible. Il y a chez lui une sorte d’évidence dans le
discours.
Et
après ces débuts d’adolescent ?
J'arrive
donc à Paris en 1977, après mon bac. Et j'entends parler de boîtes
de « jass » (rires).
La première où je me suis rendu, c’était Le
Cambridge. Jean-Paul
Amouroux y jouait. Il m'a impressionné car je n'avais pas l'occasion
d'entendre des musiciens professionnels dans ma province !
J'avais joué tout seul dans mon coin… J’avais bien assisté à
un concert d’Earl Hines, mais il me paraissait lointain. J’étais
allé voir le grand orchestre de Claude Bolling et c’était tout.
Donc mes premières rencontres avec des professionnels à Paris dans
des clubs comme le Caveau de
La Huchette, la London
Tavern, Le
Slow Club, le Petit
Journal prenaient une tout
autre dimension. J’ai aussi rencontré Pierre Calligaris, qui m’a
laissé un peu jouer en début de soirée et différents autres
musiciens qui m'accueillaient avec gentillesse. J'avais des moyens
très limités en tant que pianiste, mais surtout pour jouer en
orchestre, à écouter les autres, à me placer parmi eux…
J'apprends aussi un nouveau répertoire traditionnel, les grands
classiques, car je n'avais appris que des morceaux de piano… Il y
avait également eu un gynécologue, qui travaillait dans la clinique
de mon père, Jacques Lévy-Frebault, très sympa, qui m'avait bien
montré les basses du boogie et surtout m’avait appris à lire les
grilles, mais ma pratique restait réduite. Ces fréquentations me
permettent donc de me rendre compte intuitivement que beaucoup de
morceaux se construisaient autour de canevas et de séquences
harmoniques présentant des ressemblances. Je peux ainsi acquérir
les classiques du répertoire traditionnel… Je jouais ainsi une
fois par semaine avec des musiciens amateurs, jusqu'à ce que je
rencontre des musiciens plus sérieux. En 1980 arrive un jour au
Cambridge,
Gilbert Leroux, flanqué d'Alain Marquet (cl) et Jean-Marc Ternois
(tb). Ces types jouaient vraiment bien, et je les ai entendus jouer
en direct. Je changeais de catégorie. Comme Gilbert avait parfois
besoin de remplacer son pianiste, il m'a donc parfois proposé de
jouer avec eux. Or son pianiste, à cette époque, était François
Rilhac, pianiste confirmé, qui jouait très bien, souvent avec
Jean-Loup Longnon et parfois en solo. Je me suis donc fait un devoir
d’aller voir et entendre ce pianiste, dont tout le monde disait
qu’il était jeune, qu'il jouait formidable, comme Tatum !
J'ai trouvé un type hirsute, profondément antipathique, le nez dans
son assiette, qui parlait dans sa barbe, bouffait avec ses doigts,
très sale – tu vois le tableau – le contraire de moi !
J’étais un étudiant de bonne famille, propre sur moi (rires).
Lui très limite, les baskets troués… La conversation ne s'est pas
engagée vraiment bien. Je me suis présenté pour lui expliquer un
peu pourquoi je venais l’entendre, et je lui ai demandé :
« Qu'est-ce que tu aimes comme pianiste » ? « Tous
les mecs qui jouent bien ! », a-t-il répondu, toujours
aussi aimable. Alain Bernard était là également. François et lui
semblaient avoir rencontré une copine commune, qu'ils appréciaient
différemment ! Je les emmerdais vraiment. Comme il voulait
continuer à parler, François m'a demandé de commencer le set avec
les types de La Louisiane
avec lesquels j'avais joué la veille. Et là, quand nous avons
commencé à jouer, miracle !, ils se sont arrêtés de parler
gonzesse et ils ont commencé à commenter : « Ecoute, le
mec, il joue… ». Toujours aussi délicat dans sa façon de
parler, Rilhac a proposé aux musiciens d’aller prendre un pot pour
pouvoir m'entendre seul, jouer en solo. Et à sa demande, j’ai joué
« Carolina Shout », morceau assez compliqué, l’examen
de passage, comme à Harlem en 1930, tu vois ! Bien sûr, je lui
fais la coda, le truc casse-pattes : « Et il joue la
coda ! », crie-t-il. On est tombé dans les bras l'un de
l'autre, et nous sommes devenus, à partir de ce moment, les
meilleurs copains (rire
ému).
A
l'époque, François jouait plus Peterson que Tatum ; il ne
connaissait pas très bien les règles et les exigences du stride.
Il m'a demandé de lui montrer des trucs. Et il m’en a montré
également que je ne connaissais pas. Je faisais en ce temps mes
premières années de médecine. Quand j'ai préparé l'internat,
j'ai dû un peu arrêter le piano, et j'ai cessé de jouer dans les
bars et les boîtes. Mais je dois dire qu’on a bien bossé
ensemble. On a découvert ensemble beaucoup de choses et de
musiciens, dont Donald Lambert. J'ai fait avec lui beaucoup de
progrès : accords dissonants, renversements d’accords,
toucher du piano… ce que tout pianiste doit savoir. Lui avait
d'autres lacunes, qu'il a comblées ; il avait une oreille moins
précise que la mienne mais il était plus aguerri, il possédait
déjà une technique plus maîtrisée. Nous avons fait beaucoup de
progrès l’un grâce à l’autre ; il y avait une sorte
d’émulation dans le fait de travailler ensemble.
Quand
et comment prend naissance votre duo ?
Notre
duo commence à exister en 1983 avec un concert au Petit Journal
St-Michel. Nous étions allés voir et entendre le duo Dick Hyman et
Dick Welltood à la Grande Parade, à Nice. Nous avons sympathisé
avec eux. Et après nous avoir entendus, ils nous ont encouragés
dans notre projet de duo. Et ça a très bien marché jusqu'en 1990.
Nous avons joué un peu partout, dans pas mal de festivals ; à
Paris, nous ne jouions pas souvent ; nous répétions chez
Magne, rue Raymond-Poincaré, où nous louions un studio à l’heure !
Un fois, nous avons travaillé au Petit Journal Montparnasse. En
fait, nous faisions surtout des concerts en province : à Rouen,
à Montauban plusieurs fois, à Antibes en première partie de Slim
Gaillard. Nous nous sommes produits en concert en remplacement de
Dave Brubeck défaillant à Munich, au même programme que Dorothy
Donegan et Joe Turner ! Le duo a très bien fonctionné jusqu'en
1990 ; je me souviens de Rilhac en tenue de soirée avec ses
baskets troués (éclats de
rire). Et en 1990, François
est tombé suffisamment malade pour que nous ne puissions plus jouer
ensemble. Et ça a été terminé ! J'ai dû pousser François
pour faire un disque ; il n'aimait pas ça. Nous avons donc fait
cet album chez Yahama à Marne-la-Vallée où il bossait ; sur
deux grands pianos de concert en deux après-midi. Ça a été comme
sur des roulettes !
Par
la suite, François est entré en dépression ; il jouait de
moins en moins… jusqu'à son suicide en 1993. Il avait, d'une
certaine façon, programmé sa fin. Pour moi, une perte immense. Un
ami très cher, proche, un complément musical. Je n'ai pas voulu
jouer de piano et surtout de duo de piano pendant deux ou trois ans.
Je ne pouvais pas. Sa mort m'a vraiment beaucoup touché. Nous avions
trois mois de différence ! Voir un type qui se tue à 33 ans
alors que tout aurait pu aller si bien pour lui. C'était le seul mec
avec lequel je jouais qui n'était pas plus âgé que moi. Tous les
autres avaient 10 ou 15 ans de plus. J'ai eu un gros gros coup de
blues ; un moment difficile à passer. J'ai ensuite continué à
jouer du piano, en particulier avec le Paris Washboard avec lequel je
travaillais depuis 1988. Je ne voulais surtout plus jouer en duo de
piano. J'avais connu un vrai bonheur musical partagé avec François.
C'était un peu ma façon de lui rendre hommage. C'était fini,
basta !
J'ai
l'impression que ton style a changé après ; il est devenu plus
lyrique, moins spectaculaire dans ton album enregistré en 1995.
Oui,
c'est vrai. Tu as raison. La disparition de François m'a en quelque
sorte libéré. Tant qu'il était vivant, il fallait que j'assume et
surtout que j’assure, que je montre que j'étais aussi fort que
lui. J'avais pourtant acquis un savoir qui m'aurait permis de faire
autre chose. Mais tant qu'il était là, je n'ai pas pu l'exprimer en
dehors de lui. Il fallait jouer dans la démonstration. D'ailleurs
François, qui vivait un peu dans ce monde-là, style Harlem des
années 1930, en aimait les anecdotes ; il s'y était même un
peu réfugié. J'avais, de mon côté, grandi aussi ! Mais sans
m’en rendre compte, occupés que nous étions à nous tirer un peu
la bourre. En effet, je m’étais marié en 1988, j'avais terminé
mon internat, et j’étais devenu chef de clinique en 1990. En
quelque sorte je m'étais installé dans la sécurité sans bien m’en
rendre compte. Et puis j'ai eu mon premier enfant en 1992. Ce sont
des évènements qui comptent dans la vie d’un homme. J'avais
acquis de la maturité. Tout cela m’avait mis du plomb dans la
cervelle, sans que je m'en rende compte sur le moment.
Comment
as-tu pris le virage ?
Pendant
un temps, entre 1992 et 1997, j’ai joué en trio avec Patrick
Saussois (g) et Enzo Mucci (b). J'ai aussi fait des progrès en
fréquentant les univers de Tatum, Nat King Cole, Oscar Peterson…
Avec le stride,
j'avais une main gauche encombrante, dont je me suis défait très
tardivement. Le guitariste m'a fait prendre conscience d'autres
réalités. Avec cette formation, nous avons accompagné Benny
Waters, Maxim Saury… Quant à Paris Washboard, j’ai toujours
continué parce que je prends un grand plaisir à jouer cette
musique. De plus cette formation, qui compte Alain Marquet (cl),
Daniel Barda (tb), Gilbert Leroux puis Gérard Bagot (washb) m'a
permis, pendant douze ans, d'aller chaque année at The
Great Connecticut Traditional Jazz Festival de
Moodus, Festival de musique traditionnelle, pour présenter les
disques que nous enregistrions pour notre maison de disques, Stomp
Off Records. Mais
parallèlement, je m'emploie à me produire en solo. Les Suisses
(Jazz Connaisseurs) ont commencé à s'intéresser à moi parce que
les disques que j'enregistrais pour eux se vendaient assez bien. Je
pars souvent jouer en Suisse à Zurich et en Suisse Allemande ainsi
qu’à Ascona. Je me suis fait connaître internationalement, et
j’ai rencontré des musiciens européens et américains de moins en
moins traditionnels. Maintenant, je suis invité dans des festivals
américains où se produisent des musiciens comme Ralph Sutton,
Neville Dickie, Warren Vaché, Dick Hyman… qui semblent m'apprécier
en tant que pianiste de jazz et avec lesquels je joue fréquemment en
duo.
Dans
le récit que tu fais de ta carrière, il semble y avoir peu
d’instruments en dehors du piano, hormis ceux du Paris Washboard.
C’est
une fausse impression. Il est vrai que je suis pianiste et que cet
instrument a été mon centre d’intérêt, ne serait-ce qu’en
raison de mon attachement au stride ;
à partir du moment où je suis arrivé à Paris, et dans la mesure
où j’ai essayé de jouer en club, fût-ce en amateur, il a bien
fallu que je m’intéresse et que je m’adapte aux autres
instruments. Et rapidement, j’ai été amené à jouer en
orchestre. C’est ainsi que j’ai commencé, au début des années
1980 à jouer avec Dan Vernhettes. En 1982-83, j’ai aussi travaillé
avec Dominique Sanchez (ts) et Joël Lacroix, qui depuis est mort.
Même avant la disparition de François Rilhac en 1992, je jouais
souvent dans la formation de Gilbert Leroux, dans laquelle je le
remplaçais souvent car il jouait aussi à l’époque avec Marcel
Zanini.
D’autres
formules me plaisent également, le duo par exemple. J’appréciais
particulièrement celui avec trompette. C’est un instrument qui
permet pratiquer une musique aérée – sauf avec Jean-Loup Longnon
qui est à part parce qu’il « en met partout » ;
mais la trompette est en général un instrument qui laisse sa place
au piano et il est permis de dialoguer avec. Ainsi, en 1990, j’ai
eu l’occasion de jouer en duo trompette-piano avec Doc Cheatham au
Festival de Montauban, dans le cadre de son passage avec la chanteuse
Angela Brown. Nous avons d’ailleurs repris cette formule avec Alain
Bouchet l’année suivante à Limoges et à Oléron. J’ai aussi eu
l’occasion de jouer avec François Biensan ; nous avons même
fait un enregistrement de plusieurs jours avec lui chez Dominique
Burucoa, à Bayonne. L’album n’est jamais sorti ; François
l’ayant estimé « pas présentable ». J’ai également
souvent eu l’occasion de jouer en duo avec le clarinettiste Evan
Christopher ; je l’avais rencontré au début des années 2000
en Californie ; nous avions fait le bœuf, à la suite de quoi
nous avons donné un concert au YMCA de New York, et nous avons
souvent recommencé en France. Dans le duo, il y a une véritable
aventure ; Evan se prête magnifiquement à cette prise de
risque. Quand, au cours de l’année 2006, l’occasion de jouer
avec Michel Pastre s’est présentée, je ne l’ai pas laissé
passer. Nous avions une certaine proximité, je lui avais présenté
celle qui allait devenir son épouse. J’adore ce musicien ; il
a cette sonorité superbe qui vient d’Herschel Evans. Au début,
Michel fonctionnait comme un soliste accompagné par un pianiste. Il
a petit à petit découvert l’originalité et la spécificité du
duo et maintenant c’est un bonheur ; nous avons appris à nous
écouter et la conversation s’engage : le dialogue ténor -
piano devient parfois assez extraordinaire. Nous avons eu l’occasion
à Bayonne de jouer en trio avec Jérôme Etcheberry (tp). C’était
formidable ! La musique prend parfois une autre dimension.
Depuis quelques mois (2014), je travaille en duo avec un jeune
violoniste, Alexis Lograda, qui a un gros potentiel.
Mais
en formation plus étoffée, as-tu l’occasion de jouer ?
Oui,
bien sûr et de plus en plus. Au début des années 1990, il y avait
eu les Clarinet
Serenaders de
Jacques Gauthé et Alain Marquet. Plus récemment, s’est constitué
un sextet qui comprend Jérôme Etchéberry, Michel Pastre, Enzo
Mucci (g), Raphaël Dever (b) et selon les cas Guillaume Nouaux (dm)
ou François Laudet (dm), sans compter le tout nouveau Super
Swing Project avec Jérôme
Etchéberry, Daniel Barda (tb), Charles Prévost (whb). Je découvre
d’autres fonctions dans le rôle et dans la façon de jouer du
piano. Avec Saussois, au début des années 1990, j’ai beaucoup
appris de musiciens comme Nat King Cole, Teddy Wilson, Hank Jones et
Bud Powell dans la façon d’accompagner, dans leur façon de
s’intégrer aux ensembles. Au-delà de l’aspect purement
technique, je n’ai pu entrer dans l’univers d’Earl Hines
qu’après être passé par Teddy Wilson. Hines n’est pas un
pianiste stride,
je ne pouvais pas le comprendre. En jouant
dans ces formations
moyennes, j’ai acquis d’autres manières de phraser à la main
droite ; j’ai acquis plus de liberté mais aussi découvert
plus d’exigence dans la construction du discours, la main gauche
structurant de manière moins mécaniste et moins rigide l’ensemble.
Comment
es-tu perçu par le milieu médical ?
Par
les médecins, quand ils m’ont entendu, comme un phénomène. Car
j'avais peur du « qu’en-dira-t-on ». En tant que
médecin, je tiens à bien faire mon métier de médecin avec toutes
ses exigences, et je ne dis pas que je suis musicien. Quand mes
confrères le découvrent, ils sont surpris et surtout qu'on puisse
mener les deux activités de front. Je n'ai pas besoin de beaucoup
travailler pour maintenir le niveau qui est le mien actuellement.
J'arrive à dégager le temps nécessaire pour me maintenir et même
progresser. Il faut reconnaître que je bénéficie d’un statut
très privilégié : ma profession me permet de vivre
correctement, de jouer quand j'ai envie, avec qui j'ai envie. La
musique que je joue, je l'ai dans la tête et dans les doigts, de
sorte que je n'ai pas besoin, comme un professionnel, de tout savoir
faire. C'est la raison pour laquelle je la joue avec autant
d'enthousiasme. Il n'est pas certain que j'aurais autant de joie à
jouer de la musique si j'étais musicien professionnel.
Comment
es-tu perçu par les musiciens professionnels ?
Pour
les musiciens, c'est plus difficile à savoir. Ceux avec lesquels je
joue sont bienveillants et semblent m'apprécier comme un des leurs.
Pour les autres, je l'ignore et s'il se trouve, peut-être ne suis-je
pas aimé de tous car quand je travaille, je prends une affaire à un
professionnel qui lui a besoin de gagner sa vie, ce qui, je
comprends, n'est pas très agréable. Par ailleurs ma liberté, qui
me permet de jouer quand et avec qui je veux, peut également ne pas
plaire à tous.
Tu ne travailles pas
beaucoup ton instrument, dis-tu…
Effectivement,
il y a des jours où je ne joue pas du tout et d'autres où j'en joue
une heure. Il est rare que je joue plus d'une heure dans la journée.
Si je n'ai pas un concert en préparation, je travaille 1H30 par
semaine, soit à peu près dix minutes par jour. Mais quand je
rentre, j'ai plaisir à retrouver mon piano. Ce n'est ni un travail
ni une contrainte, c'est un bonheur, et je n'attends que ça !
Il me tarde de rentrer pour jouer un peu avant qu'il ne soit trop
tard ; j'habite dans un immeuble à Paris. Lorsque j'arrive à
19h30, je joue 30 minutes; et parfois j'ai prévu, à l'avance, ce
que je vais faire, ce que j'ai prévu de travailler particulièrement.
Celui qui écoute à la porte ne trouvera pas cela très agréable
car j'arrête, je reprends… C'est du travail mais c'est aussi un
plaisir. Je n'ai pas envie de m'emmerder à faire de la musique.
Ton
univers, c’est l’école du jazz classique. Mais quelles sortes de
musique écoutes-tu en dehors du jazz ?
Chez
moi, il y avait des disques, de la chanson française et de la
musique classique. J'écoutais de la musique classique, surtout
Chopin, les valses et je suis attiré par cette musique, car le
stride est issu de la musique romantique. J'écoutais aussi les
symphonies de Beethoven, la Pathétique de Tchaïkovski, les
concertos de piano. Et parmi les interprètes, Dinu Lipatti pour
Chopin, plus que Samson François que je trouvais trop excessif. Il y
avait également Wilhelm Kempff pour Beethoven. Il y avait également
Toscanini, que je trouvais rythmiquement intéressant dans les
symphonies de Beethoven, même si plus tard je me suis rendu compte
qu'on pouvait les jouer moins vite. Il y avait aussi Richter, Clara
Haskil… Mais Lipatti a été mon préféré. Ma mère aimait
Ravel ; c’est elle qui m'y a initié. Debussy me paraissait
moins évident parce que moins thématique ; il me paraissait
plus compliqué. J'écoute maintenant toujours de la musique
classique. Mais, dans ce type de musique, je préfère la musique
instrumentale plus que celle qui est chantée, pour des raisons de
justesse.
As-tu des références
en matière de musique de jazz ?
Bien
évidemment tous les pianistes, dont nous avons parlé au cours de
cet entretien et qui ont contribué à devenir ce que je suis. Mais
il y a également les autres : Armstrong est fondamental, c'est
magnifique ; Sidney Bechet est stupéfiant dans sa construction
et son lyrisme ; l'orchestre du Duke plus que celui de Basie qui
me paraît plus simpliste. Et le blues, même si je n'en écoute pas
très longtemps ; c'est, je crois, une forme essentielle de
l’expression de l'âme noire. Tous les jours, je joue un blues, il
me vient presque spontanément à l’esprit et dans les doigts. Et
il y a Coleman Hawkins, formidable par son sens du développement
harmonique. Bud Powell et moins Charlie Parker... J’éprouve de
l’intérêt pour Bill Evans à cause de sa manière de jouer avec
les structures. Il y a également Erroll Garner, magnifique, que j’ai
mis un certain temps à vraiment m’approprier. Au-delà du jazz, je
m'intéresse à d’autres formes d’expression musicale. J’écoute
de plus en plus de bossa nova ; c’est une belle musique d’une
immense richesse tant mélodique qu’harmonique et rythmique.
Depuis
une quinzaine d’années, il n’y a pas eu grand-chose qui ait
retenu mon attention ou qui présente un réel intérêt à mes yeux.
Je suis triste, très triste de la pauvreté harmonique dans la
musique qu’on nomme actuellement jazz ; je n'y entends plus
d'histoire. Sous cette étiquette « jazz », je découvre
une sous-musique occidentale mal faite, mal réalisée, pseudo
contemporaine… Ceci étant dit, il y a cependant de superbes
musiciens vivants et parfois jeunes ou pas trop vieux : le
saxophoniste ténor, Harry Allen, est un prodigieux musicien. Dick
Hyman fait partie de mes préférés. J’apprécie particulièrement
Rossano Sportiello, Dado Moroni, Warren Vaché, Bill Charlap,
Jean-Loup Longnon, Nicolas Montier… Tous ces gens ont un talent
immense.
As-tu
été concerné par les différentes écoles du jazz, par ce qu’on
appelle un peu vite l'évolution du jazz ?
Oui.
Toutes les formes du jazz m'ont intéressé, mais à l'époque de ma
découverte et de ma formation j'étais centré sur les pianistes
stride.
J'ai voulu faire un travail chronologique analytique. J'avais
l'anthologie d'Henri Renaud… Mon père m'avait offert des albums
d'Erroll Garner et de Peterson ; au début cette musique ne
m’attirait pas, elle me semblait trop compliquée. J'avais aussi
des disques de Bud Powell et de Monk. Mais en fait, j'y suis venu
progressivement et naturellement en m'appropriant les formes
musicales précédentes. Quand j'ai engrangé Tatum, je me suis
intéressé au bebop et par la suite jusqu'à Bill Evans et Michel
Petrucciani. J'ai aimé Monk, Horace Silver, Bud, McCoy… Peut-être
pas pour jouer leur musique mais pour ce qu’elles sont, et même
pour leur emprunter quelques-uns de leurs apports et les intégrer
dans la musique que je joue. Je crois que beaucoup de musiciens,
mêmes américains, ne connaissent pas leur culture, leur patrimoine
musical. Par ailleurs, la technique de la musique que je joue
nécessite de longues heures de travail. Il y a un snobisme de penser
que ce qui a déjà été fait est ringard au motif que beaucoup
pensent être capable de faire leur propre musique. Il y a donc une
peur de certains musiciens d'être catalogués parmi les « vieux »
parce qu’ils joueraient une musique enracinée. C’est
regrettable, mais c’est ainsi.
Comment perçois-tu la
musique en ce qui te concerne ?
Vivant
en partie comme un artiste, sans en avoir les inconvénients, je
considère avoir une chance exceptionnelle de pratiquer cet art.
C'est une évasion, c'est une capacité de me retrouver avec moi, de
réfléchir. C’est une activité qui n'est pas liée à la
possibilité de faire du mal à quelqu'un ou de profiter de l'autre.
La création magnifie l'être humain. L'art n'est pas fait pour
gagner de l'argent mais pour s'exprimer, pour se réaliser. Qu'il
permette de gagner de l'argent, pourquoi pas ? Mais ce n'est pas
son but premier. L’art est là pour essayer de te remettre en
question et pour progresser. L'art a une fonction sociale, celle
d’harmoniser la vie des gens. La culture c'est la culture, comme
les découvertes scientifiques au service des hommes. C'est un
dépassement humain, conscient, profond. Et il faut arrêter de dire
au public ce qu’il doit aimer, ce qu’il doit comprendre. Je pense
que le public possède une intelligence certaine et qu’il faut
cesser de le considérer comme idiot ; les artistes peuvent
donc, sans se prostituer, proposer des œuvres de qualité dont ils
recevront le succès qu’ils méritent.
Sélection
discographique
Leader-coleader LP 1986. François Rilhac & Louis Mazetier - Mégalo Piano Stride, Black & Blue 33214 CD 1989. Louis Mazetier & François Rilhac + Alain Marquet, Echoes of Carolina (Prix de l'Académie du Jazz 1992), Stomp Off Records 1218 CD 1990. Louis Mazetier, François Rilhac et autres, Ticklin' at the District for Those We Love ! Hot Club du Gâtinais 01-02 CD 1991. Louis Mazetier, Drop Me off in Harlem, Djaz Records 510-2 CD 1991. The Entertainers: Ray Bryant, Louis Mazetier, Philippe Carment, Pierre Calligaris At the Hot Club de Rouen Live, Jazzophile 01 CD 1994. Louis Mazetier & Neville Dickie, If Dreams Come True, Stomp Off Records 1289 CD 1995. Louis Mazetier & Neville Dickie, Harlem Strut, Stomp Off Records 1302 CD 1995. Louis Mazetier, Good Vibrations, Jazz Connaisseur 9521-2 CD 1995. Louis Mazetier, What A Treat, Jazz Connaisseur 9522-2 CD 1995, 1996, 2000, Henri Chaix, Neville Dickie, Louis Mazetier, Hot Piano, Traditional Jazz Piano 002 CD 1997. Louis Mazetier & Bernd Lhotzky + Susan Dumas (voc), Elmau Strid(Prix Fats Waller de l'Académie du Jazz 2002e Project, Hot Sky Records 02542 CD 1999. Louis Mazetier & Peter Ecklund, A Friendly Chat, Jazz Connaisseur 9932-2 CD 2001. Louis Mazetier & Dick Hyman, Barrel of Keys, Jazz Connaisseur 0140-2 CD 2002. Louis Mazetier, Pianistically Yours-Piano Solo, Jazz Connaisseur 0242-2 CD 2002. Louis Mazetier, The Piano Starts Talkin’ (Grand Prix du disque du Hot Club de France 2003), Jazz Connaisseur 0243-2 CD. 2002. Louis Mazetier und Bernd Lhotzky Piano Duos und Solos, Stridin’ at la Stadaila, Jazz Connaisseur 0201-2 CD. 2003. Jean-Loup Longnon/Louis Mazetier, Just Friends, Jigma 05/01/1 CD. 2005. Jeff Barnhart & Louis Mazetier, Live, Pacific Ballroom, OCCJF 102 CD. 2007. Louis Mazetier, Tributes Portraits and Others Stories, Arbors Piano Series Volume 18, Arbors Records 19361 CD. 2010. Louis Mazetier Solos and Duets, Stride and Swing Piano Summit – Finale, Jazz Connaisseur 1056 & 1057 (Coffret Jazz Connaisseur 1058) DVD. 2010. Louis Mazetier Solos and Duets, Stride and Swing Piano Summit – Finale, Jazz Connaisseur 1055 (Coffret Jazz Connaisseur 1058) CD. 2011. Louis Mazetier - My Own Stuff, Arbors Piano Series, Volume 24, Arbors 19442
SidemanLP
1984. Gilbert Leroux Wasboard Group, Jazz
Nouvelle-Orléans, Soleil
Masqué 33020 CD
1986. Gilbert Leroux & Alain Marquet avec Louis Mazetier,
Washboard Group Live!
Djaz Records 508-2 LP
1988. Paris Washboard, When
We’re Smiling,
Stomp Off 1162 CD
1990. Jacques Gauthé & Alain Marquet Clarinet Serenaders, Paris
Blues,
Stomp Off Records 1216 CD
1990. Paris Washboard, 20e
Jazz Festival Breda,
Feel the Jazz 8 CD
1990. Les Nuits Jazz & Boogie Piano, Duo
François Rilhac Louis Mazetier,
Jazztrade 5033/Swingland 12 CD
1993. Paris Washboard, Waiting
for the Sunrise,
Stomp Off 1261 CD
1993. Paris Washboard, Live
in Gaveau,
Vibrato CD
1993. Paris Washboard, 23
Internationales Dixieland Festival Dresden,
Bestel 9394 CD
1994. Paris Washboard, Jam
am See,
Plöner
Jazz Tage, Festival CD Vol 1 CD
1994. Paris Washboard, California
Here We Come,
Stomp Off 1280 CD
1995. Paris Washboard, 25°
Oude Stijl Festival de Breda,
Feel The Jazz 34 CD
1995. Paris Washboard, The
1995 Great Connecticut Traditional Jazz Festival,
95CTJAZDIDX036753 CD
1995. Paris Washboard, Truckin’,
Stomp Off 1293 CD
1996. Paris Washboard, The
Love Nest,
Stomp Off 1308 CD
1997. Paris Washboard, 6e
Dreher Ragtime and Jazz Festival 97,
Kecskemeti Jazz Alapitvany 4012
CD
1997. Paris Washboard, Love
for Sale,
Stomp Off 1326 CD.
1998. Paris Washboard, Les
Rendez-vous Jazz & Blues, Vol 1 CD.
1998. Paris Washboard, One
More Time,
Stomp Off 1338 CD.
1999. Paris Washboard, Caravan/
Merci Duke,
Stomp Off 1347 CD.
2000. Paris Washboard, Wild
Cat Blues, Merci Fats,
Stomp Off 1359 CD.
2001. Paris Washboard, Super,
Jazztrade 4084 CD.
2002. Paris Washboard, 15
Years Fresh,
Stomp Off 1391 CD.
2008. Paris Washboard, The
20 Year Entertainers,
Stomp Off 1428 CD.
2009. Paris Washboard, Live
in Monségur,
Black & Blue 708.2 CD.
2009. Jean-Loup Longnon Big Band, Encore
du Bop,
Integral Jazz 209
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