Réédition-Indispensable 32 titres Titres et personnel communiqués sur le livret Enregistré entre 1962
et mai 1963, Chicago Durée : 1h 05' 39'' + 1h 14'
50'' Living Music 44 (www.livingmusic.com)
Un trésor vous
dis-je ! Trente-deux petites perles finement ouvrées réunies
en un double album, posé là au milieu d’une pile impressionnante
de CDs, tous… indispensables, bien sûr. Incroyable ! Une
irresponsabilité du marché. « Pouvou qué ça doure ! »
comme aurait dit Maria Letizia Bonaparte née Ramolino. Pensez donc :
le sextet de Paul Winter au début de son existence
discographique. Inespéré ! Vous savez bien, il s’agit de ce
« little big band » atypique, composé d’étudiants et
dont les enregistrements étaient introuvables jusque là. Peu
mentionné dans les dictionnaires et peu connu des amateurs, il est,
pourtant – à l’issue d’une tournée triomphale en Amérique du
Sud dans le cadre d’une vaste opération de séduction lancée par
le département d’Etat des Etats-Unis en 62 – le seul orchestre
de jazz à être reçu le 19 novembre de cette année là, à la
Maison Blanche, par les Kennedy et enregistré de surcroît. Les
preuves tangibles sont là. Pas d’inquiétude. Le livret, fort
bien fait, vous racontera, par le menu, l’histoire, à la fois
banale et unique, de ces kids du grand Chicago et de l’opiniâtre
volonté de ses deux pères fondateurs, l’altiste Paul Winter et le
trompettiste Dick Whitshell, de donner le jour à un sextet hors
normes : line up mixte, front line plus proche du R&B que du
jazz, compositions d’une folle originalité et passage obligé pour
les jeunes talents (de Jay Cameron au sax baryton, à Chuck Israels
et Cecil McBee à la basse, de Ben Riley, Freddie Waits à la
batterie à Jeremy Steig à la flute…). Mené tambour battant
par un saxophoniste aux phrases dignes d’Adderley, le sextet permet
d’abord de découvrir le baryton Les Rout, au phrasé binaire,
staccato, à la manière de King Curtis et à l’opposé des styles
en vigueur sur l’instrument, de Mulligan à Pepper Adams en passant
par Serge Chaloff. Sur du ternaire, c’est assez… singulier.
« Routeousness » qui lui est consacré est un sommet du
genre. Unique ! Quant à Warren Bernardt, le futur pianiste du
groupe Steps Ahead, il se montre, avant tout, disciple de Wynton
Kelly. On est encore loin de ce mélange subtil entre Oscar Peterson
et Bill Evans qu’il saura synthétiser, plus tard, en un tout
cohérent. Composée d’originaux et de thèmes signés par
Jimmy Heath, Tom Mc Intosh, John Lewis etc., auxquels s’agrègent
de nombreux standards de la bossa nova, ramenés du Brésil au même
moment que Stan Getz, la musique délivrée par le sextet sait
surprendre tant par ses canevas que par cette fraicheur de ton qui la
place en dehors des courants stylistiques dominants. C’est la aussi
tout son intérêt. Vos oreilles vous le confirmeront. A découvrir
en urgence.
Jean-Jacques Taïb
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