Joseph (Smokey) Johnson qui fut batteur de Fats Domino pendant plus de 30 ans est une légende dans sa ville natale, mais ignoré des «spécialistes du jazz» malgré l’influence qu’il a exercée sur Herlin Riley. Il est décédé le mardi 6 octobre 2015 des suites d’une longue maladie, comme l’on dit.
Son premier instrument fut le trombone. C’est à l’âge de 12 ans qu’il aborde la batterie. Smokey a étudié la musique auprès d'Yvonne Busch (comme le non moins légendaire, localement, James Black). Smokey est professionnel à 17 ans (1953) et il joue déjà au Dew Drop, et pour James «Sugarboy» Crawford puis Dave Bartholomew (et grâce à cela, il commence à enregistrer pour le label Imperial).
Smokey a dit avoir été influencé par Ed Blackwell (dès 1954), Wilber Hogan, Charles «Honeyboy» Otis. Freddie Kohlman lui montre comment utiliser la cymbale. Il a joué pour Red Tyler (1961), les Royal Dukes of Rhythm (1963-1966), Fats Domino (dès les années 1950 à 1970, puis en 1973, 1983), Clive Wilson (1986), Lilian Boutté (1988), Leroy Jones, Ed Frank, Dave Bartholomew (1990).
Mais dès 1961, Smokey Johnson est devenu un requin de studio à New Orleans (session man). Avec Wardell Quezerque, il travaille pour l’album Trick Bag d’Earl King, produit par Dave Bartholomew, prototype du funk néo-orléanais. Peu après, il passe une audition pour Motown où il est engagé. Mais cinq mois plus tard, Smokey a le mal du pays et revient à New Orleans.
En 1963 et 1964, Dave Bartholomew l’utilise pour ses deux derniers albums en big band et le met en valeur dans «Portrait of a Drummer» dans New Orleans House Party. En 1964, un an après sa création, Smokey Johnson devient le batteur «maison» du label NoLa. C’est cette année-là que Smokey Johnson est co-compositeur avec Wardell Quezergue de «It Ain’t My Fault». L’enregistrement qu’il en fit (1965, NoLa 706) fut un succès local considérable et historiquement l’intégration du beat parade (dit «second line») dans le rhythm’n blues : «...on this tune, he would play the basic new orleans drum pattern but on the hi-hat. And on the ‘and’ of beat 4 he played on the floor tom… Cymbal keeps it going, the hi-hat is pretty much on 2 and 4, and there’s a dialogue between the snare and the bass drum.» (Herlin Riley, New Orleans Jazz and Second Line Drumming, p.68, Warner Bros Publications Inc). Ce «It Ain’t My Fault» fut adopté, en effet boomerang, par les brass bands néo-orléanais.
Le 6e des 45 tours de Smokey Johnson pour NoLa (n° 720, 1966), «I Can’t Help It», ne fut pas moins influent dans le domaine du funk. En 1964, il enregistre pour Watch (n°45-1900) avec Pr. Longhair, le «Big Chief» composé par Earl King (siffleur et chanteur) : ce sont Wardell Quezergue, Earl King et Smokey Johnson qui le convainquirent d'inclure une section de onze à quinze cuivres: «I was looking for something (unique) to play on a record. I turned the floor tom over on its side and I played on the side of the floor tom (right hand) and was playin’ rim-shots on the snare drums. I also took two sticks full of Coke caps that I had nailed on. I had two big ones that I overdubbed on that track. They used to let me do almost whatever I wanted to do on the session» (Smokey Johnson).
Smokey Johnson a cessé de jouer en 1993 à la suite d’une attaque cardiaque. Après Katrina, Smokey a vécu au Musicians Village de New Orleans.
Smokey Johnson fut l’un des trois batteurs de R’n’B fondamentaux à New Orleans, avec Earl Palmer et Hungry Williams. Il est considéré comme le maître de la batterie «moderne» à New Orleans avec James Black, Ed Blackwell et David Lee. On cherchera le CD Jump Jazz (Core 9.00916 O) réalisé à New Orleans le 20 novembre 1985 au sein du Ed Frank Quintet (Wendell Brunious, tp, Fred Kemp, ts, Erving Charles, b) pour l’apprécier dans un contexte hard bop. Smokey Johnson a influencé James Black, Idris Muhammad (Leo Morris), Joseph Modeliste, Bunchy Johnson, John Vidacovich, Herlin Riley.