L'excellent trompette bop Louis Edward Lewis Smith, qui vient de disparaître, est un cousin de Booker Little. Son oncle maternel est le père de Booker et Vera Little. Son père Walter Smith aimait le blues, le gospel et le jazz. C'est ainsi qu'il offre au jeune Louis un vieille trompette que ce dernier travaille à partir de l'âge de 13 ans. Son père l'amène à Beale Street pour écouter jazz, blues, prendre part à des jams.

En 1948, Louis est membre des Manassas High School Rhythm Bombers. Il est élève de la Tennessee State University (1948-52), puis il se perfectionne auprès de Clifford Lillya (Michigan University, 1953-54). Louis Smith joue au sein des Tennessee State Collegians, et il a l'occasion de jouer avec Billy Eckstine, Sarah Vaughan et Lionel Hampton. Il est diplômé en trompette à la Tennessee State.

Il a l'occasion de se produire avec Miles Davis, Dizzy Gillespie, Thad Jones, Billy Mitchell vers 1954. Après son service militaire dans un Special Servies Band (1954-55), il se fixe à Atlanta. Louis Smith a toutefois l'occasion de jouer avec Sonny Stitt, Count Basie, Kenny Dorham, Donald Byrd, Lou Donaldson, Zoot Sims, Philly Joe Jones, Art Blakey (1955-56).

Il fait des séjours à New York (février 1957, printemps 1958, 1960), et il a travaillé pour Horace Silver, trois mois, en remplacement d’Art Farmer. On l'entend aussi avec Wynton Kelly, Duke Pearson, Tommy Flanagan, Booker Little (1960), Phineas Newborn, à la tête de son quartet (Shack Club, Louisville, 1967-68), avec Barry Harris. Il est musicien de studio pour Motown, et tourne avec les Temptations, Marvin Gaye et d'autres.

En 1978, il signe un contrat avec SteepleChase. Il joue avec Dizzy Gillespie (Grande Parade de Nice, 7 juillet 1978), se produit au Festival de Montreux. En 1978-79, il apparait à nouveau en leader à New York avec George Coleman et Harold Mabern, d'autres élément de la «Memphis connection».

Mais, n'aimant pas les tournées, Louis Smith fut aussi et surtout un enseignant. Il a travaillé à la Booker T. Washington High School (Atlanta, années 1950), la Tennessee State University (comme band director), la Kentucky State University, l'University of Michigan (1971-87, directeur des Jazz Bands), dans les écoles publiques d'Ann Arbor (1968-93), à l'Eastman School (improvisation jazz) où il laisse à ses élèves le souvenir d'un professeur très impliqué et encourageant: «Many factors have shaped jazz in Ann Arbor, but trumpeter and educator Louis Smith has to be at the top of the list for modern jazz and education.  Sean Dobbins, Rick Roe, Justin Walter and Ingrid Racine will testify to his grace, wisdom, strength and total honesty as a teacher. He encouraged a professional attitude and exponential musical growth from middle school student.» (Linda Yohn).

Louis Smith était perfectionniste, et, après sa retraite de l'enseignement, il a pris à nouveau des cours de trompette pour améliorier ses tenues de son (long tones) et la solidité de son embouchement.

En 2005, il a été victime d’un AVC (paralysie, aphasie). Le pronostic de récupération était réservé à l'University of Michigan jusqu'à ce qu'on intègre la musique dans sa thérapie (Lynn Chenoweth fut sa musicothérapeute). Louis parvint à rejouer de la trompette, alors que d'autres symptômes n'avaient pas totalement regressé. On découvrit grâce à lui que jouer de la musique concerne le même territoire du cerveau que l'aphasie et la maîtrise du langage (aire de Broca). Le Dr. Gordon Krainen et Lynn Chenoweth ont présenté le cas clinique de Louis Smith à l'American Speech and Hearing Association, à Chicago (2013). Louis Smith accompagné par Krainen y a joué trois morceaux. Une grande réussite pour le Dr. Krainen et Louis Smith qui a risqué un placement en maison d'handicapés. Son épouse Lulu s'est occupée de ses soins journaliers jusqu'au décès de Louis Smith, le samedi 20 août 2016 lors d'une séance de thérapie au Glacer Hills Rehabilitation Center.

Influencé par Fats Navarro et Clifford Brown, il a copieusement enregistré avec Kenny Burrell (1956, Swingin’ ; 1958, Blue Lights, Blue Note 1596-7), Horace Silver (1958, avec Junior Cook, ts, Live at Newport, «Tippin»), Bill Dobbins (Blues, 1988), Mickey Tucker (1989), Michel Sardaby (1992, Straight On, Sound Hill 8003) et sous son nom (1957, Here Comes Louis Smith, Blue Note 1584 ; 1958, Smithville, Blue Note 1694; 1959, avec Young Men From Memphis, dont Booker Little, Down Home Reunion, United Artists 4029 et Fresh Sounds 1642; 1978-79, chez SteepleChase: 12 albums).

Parmi ceux qu'il a influencés, on compte Booker Little, Brian Lynch et Nicholas Payton.

Jazz Hot présente ses condoléances à Lulu, l'épouse de Louis Smith, et à ses proches.

Louis Smith et Jazz Hot: n°563-1999, Numéro Spécial 2002, Numéro Spécial 2006.
En dehors du beau parcours de musicien de jazz, d'enseignant et de la discographie de Louis Smith (n°563 et Spécial 2006) qu'il détaille lui-même, on y trouve une évocation de Memphis, des grands musiciens de jazz qui ont peuplé cette ville, Booker Little (Spécial 2006) et Phineas Newborn (Spécial 2002), entre autres…

Source: Le Monde de la Trompette et des Cuivres de Michel Laplace (DVD-Rom, michellaplace@neuf.fr)

DISCOGRAPHIE

Leader/coleader
CD 1957. Here Comes Louis Smith, Blue Note 8 52438 2
CD 1958. Smithville, Blue Note 8 726505
CD 1960. Young Men From Memphis, Down Home Reunion, United Artists 5029 (avec Booker Little, Phineas Newborn…)
CD 1978. Just Friends, SteepleChase 31096
CD 1979. Prancin’, SteepleChase 31121
CD 1990. Ballads for Lulu, SteepleChase 31268
CD 1991. Strike Up the Band, SteepleChase 31294
CD 1993. Silvering, SteepleChase 31336
CD 1994. The Very Thought of You, SteepleChase 31361
CD 1995. I Waited for You, SteepleChase 31385
CD 1997. There Goes My Heart, SteepleChase 31415
CD 1997. Soon, SteepleChase 31442
CD 1997. Jam Session vol. 7, SteepleChase 31546
CD 1999. Once in a While, SteepleChase 31464
CD 2000. The Bopsmith, SteepleChase 31489
CD 2003. Louisville, SteepleChase 31552

VIDEOS

Louis Smith, 1957: Tribute to Brownie
https://www.youtube.com/watch?v=0jFLoPV9-ME

Horace Silver, Live at Newport'58: «Tippin'»
http://www.youtube.com/watch?v=W2klD7H7fdc

Smithville, 1958: «Embraceable You»
http://www.youtube.com/watch?v=3QIf1CvvyDQ

Louis Smith Quintet: «I Remember Clifford»
https://www.youtube.com/watch?v=Cr-R1DESDZw