Christian Azzi
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21 nov. 2020
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1er décembre 1926, Paris - 21 novembre 2020, Paris
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© Jazz Hot 2020
Christian Azzi le 3 août 2000, Marciac © Lisiane Laplace
Christian
Azzi compte au nombre de ces bons jazzmen que les publications élitistes
ignorent, telle le New Grove Dictionary of Jazz, pour ne rien dire des
divers dictionnaires français de jazz. Chez les musiciens, surtout en France,
il bénéficie en revanche d'une estime enviable. Christian Azzi s'est imposé
dans le style «stride harlemiste». Et puis, il a vécu une époque porteuse où
dominent de vrais contributeurs comme Charles Delaunay, Hugues Panassié, Boris
Vian, Eddie Barclay, l'émergence des premiers festivals de jazz (Nice, 1948;
Paris, 1949) et la chance de côtoyer des artistes hors norme comme Louis
Armstrong, Sidney Bechet, Baby Dodds, Barney Bigard, Don Byas, Albert Nicholas. Michel Laplace Photos Lisiane Laplace
Christian
Azzi est né à Paris, dans le VIIe
arrondissement, au sein d'une famille bourgeoise. Ses parents lui font
étudier le piano à partir de l'âge de 6 ans environ. Il poursuit une formation
en piano classique à la Schola Cantorum et en architecture à l'Ecole Nationale
Supérieure des Beaux-Arts de Paris (1944-47). Etudiant, il découvre le jazz à
la Libération grâce à des V-Discs amenés par des officiers américains à l'Hôtel
Terminus Saint-Lazare. Christian Azzi est surtout attiré par les pianistes qui
ont enregistré pour Sidney Bechet comme Hank Duncan (1894-1968), Cliff Jackson
(1902-1970) et James P. Johnson (1894-1955). Dès 1945, Christian Azzi dirige un
groupe amateur qui comprend Maxim Saury (cl) et Gérard Bayol (tp)1. C'est Azzi
qui initie Saury sur bien des connaissances musicales. Cette formation joue à la
Maison du Droit et pour des surprises-parties. Puis, la
carrière de Christian Azzi épouse celle de Claude Luter. Il écrit avec Luter
une page d'histoire du jazz en France. Le jazz
classique à la manière néo-orléanaise –celle notamment de King Oliver– n'était
alors pas connu chez nous où l'on n'a absolument pas suivi la pseudo-chronologie qui
enfile les étapes New Orleans-Chicago-New York de 1923 à 1930. Pour cette
raison, les séances dites «Panassié», signées Tommy Ladnier-Mezz Mezzrow,
faites pour le fameux label Swing à New York en novembre 1938 (78 tours, Swing
47, 50, 64, 78) furent une vraie révélation pour un nombre restreint de
passionnés. Il faut aussi comprendre qu'avant le premier livre à prétention
historique, avec ses erreurs (sur Buddy Bolden notamment) et approximations, Jazzmen
de Frederic Ramsey, Jr. et Charles Edward Smith, sorti en 1939 aux Etats-Unis, la
légende de New Orleans en tant que berceau du jazz n'était pas lancée.
Elle n'existe pas dans le premier livre fondateur du concept jazz, Le Jazz
Hot d'Hugues Panassié (1934).
Cet élan
est coupé par la seconde guerre mondiale. Les clarinettistes Claude Abadie
(1920-2020) dans un style incertain en compagnie de Jacky Vermont (fin 1940),
puis Claude Luter (1923-2006) à partir de 1944, sont des pionniers de ce que le
tromboniste américain Turk Murphy a appelé le «jazz traditionnel». Le
cornettiste, peintre et illustrateur Pierre Merlin (1918-2000), acteur et témoin,
signale bien que la découverte de King Oliver, et donc d'une certaine
authenticité expressive, se situe en 1945, pas avant. En 1946, un noyau se
constitue autour de Claude Luter (cl), à savoir Pierre Merlin (cnt), Mowgli
Jospin (p) et Michel Pacout (dm)2. Ils débuteront le 17 avril 1946 dans la cave
de Mme Perrodo. Elle et son mari venaient de Lorient. Certaines personnes de
cette région, ayant souffert de la bataille de Normandie, étaient hébergées à
Paris. C'est à la cave des Perrodo, baptisée «Caveau des Lorientais», qu'on leur
donnait à manger. Le batteur François «Moustache» Galépidès (1929-1987),
témoin, a précisé que cette cave, au 5, rue des Carmes (Ve arrondissement), ne devenait club privé de jazz pour les jeunes,
avec l'Orchestre Luter, que les jeudis, samedis et dimanches entre 17h et 19h, et tous les soirs de la semaine de 21h à minuit. C'est ici
qu'intervient le rôle des collectionneurs de disques. Henri Bernard qui tenait
une boutique d'antiquités, rue de l'Odéon à Paris, possédait des disques de
King Oliver et c'est grâce à lui que l'équipe de Luter découvre les faces
gravées par le Creole Jazz Band, inconnues en France avant 1937 selon Hugues
Panassié, autre collectionneur majeur. Evidemment, l'orchestre de Luter dont il
est l'élément fort, prend le nom des «Lorientais». Le 25 novembre 1946, au bal
des Catherinettes et au même programme que notamment Henri Salvador et les
Frères Jacques3, Les Lorientais comptent outre Luter, Pierre Merlin, Claude
Rabanit (cnt), Christian Viénot (tb), Mowgli Jospin (p), Claude Philippe (bjo),
Guy de Fatto (b), Michel Pacout (dm). C'est ce personnel qui grave, en mars
1947, les huit premières faces de cette aventure historique. Dès le «Perdido
Street Blues» tiré à cinquante exemplaires, Claude Luter apparait à cette date
un pur disciple de Johnny Dodds. Il m'a dit utiliser à ses débuts une
clarinette système Albert. Au cours du mois de mai 1947, l'orchestre
sera à peine modifié: Christian Azzi intègre Les Lorientais. En fait, Maxim
Saury (1928-2012) a quitté l'orchestre amateur où tous deux jouaient, pour
entrer dans la formation de Claude Bolling. Christian Azzi, encore étudiant en
architecture, s'est alors mis à fréquenter le Caveau des Lorientais. Il fut
séduit par cette réplique du Creole Jazz Band de King Oliver. Un soir, Mowgli
Jospin n'étant pas venu, Luter a donc demandé à Christian Azzi de le remplacer.
Contre l'avis de ses parents, Christian Azzi a alors fait le choix d'abandonner
l'architecture pour suivre l'orchestre demandé en tournées.
Après un
mois d'engagements en Belgique, l'orchestre est retenu par Charles Delaunay
(1911-1988) pour enregistrer quatre titres pour son label Swing, à Paris,
studio Pelouze, le mercredi 25 juin 1947. Mowgli a remplacé Viénot au trombone
et Azzi tient le piano: «Careless Love Blues»/«Pimlico» (Swing 262), «Just
Gone»/«Graveyard Dream Blues» (Swing 263). C'est la première session d'enregistrement officielle de Christian Azzi et c'est une bonne réplique du Creole Jazz Band de
King Oliver. Hélas, le banjo couvre le piano dans le «plonk plonk» commun. En
France, cette façon de jouer la musique est aussi nouvelle que le «re bop/be
bop». Du jamais fait en France, et de plus avec un enthousiasme communicatif.
Toutes les faces des Lorientais, même des inédits, ont été éditées en coffret CDs sur le label Memories. C'est un document important, d'autant plus que le
livret propose des photos rares de cette équipe et donc d’Azzi, notamment avec Louis
Armstrong au Caveau des Lorientais. L'orchestre de Luter s'absente parfois du Caveau des Lorientais pour divers concerts en France (à l'Ecole Normale, le 9 novembre
1947) et ailleurs (Hollande, décembre 1947). Des enregistrements privés de
l'orchestre ont été réalisés en Hollande qui confirment que les éléments
dominants sont Pierre Merlin parfois proche de George Mitchell et de King Oliver
avec un vibrato marqué («Sister Kate» où il mène bien, le 29 décembre 1947) et
surtout Claude Luter très crédible dans le style de Johnny Dodds (il assure
dans «High Society» gravé sur disque en verre 78t.-30 cm). Dans ces
enregistrements privés, le drumming de Michel Pacout est audible et dans
l'esprit New Orleans, notamment pour «Shreveport Stomp» du 26 décembre 1947 à
Amsterdam, dans lequel le jeu de Christian Azzi, proche de celui de Lil
Hardin-Armstrong, est audible. Le même concert nous donne aussi «Black Bottom
Stomp» qui est le premier solo enregistré de Christian Azzi, un peu inspiré par
Jelly Roll Morton. Malheureusement l'enregistrement est incomplet. A la Haye,
le lundi 29 décembre 1947, Les Lorientais démontrent un bon sens du blues dans «2:19
Blues». Mais, la sonorité de Merlin est vraiment plus proche du kazoo que du
cornet. L'accompagnement de Christian Azzi aux solos de Mowgli Jospin et de
Claude Philippe est audible. Son style est sobre, ce qui est parfait pour le
blues. A cette époque, Christian Azzi est avant tout un pianiste
d'accompagnement à qui on confie peu de solos. Son seul espace de soliste est «Black
Bottom Stomp» dont on a une version non tronquée, gravée sur 78t.-30 cm le
29 décembre 1947. C'est son deuxième solo enregistré préservé!
Claude Luter (devant, 2e en partant de la gauche) et Les Lorientais
avec Christian Azzi (derrière, 3e en partant de la gauche)
Dès le 2
janvier 1948, Les Lorientais jouent déjà devant le cinéaste Jacques Becker
(1906-1960), ami de Mowgli Jospin (1924-2003). Le 3 février 1948, Charles Delaunay
enregistre une nouvelle fois cet orchestre au studio Pelouze, pour son label
Swing. «Muskrat Ramble» dont il existe deux prises démontre bien que Mowgli
Jospin jouait à cette époque du trombone à coulisse et non à pistons ce que
confirment des photos de l'orchestre prises au club des Lorientais. Après
Charles Delaunay, c'est l'autre figure aussi indispensable que contributive,
Hugues Panassié (1912-1974), qui lance les Lorientais dont Azzi est le pianiste
titulaire. Panassié n'est pas une figue moisie, il aime surtout le jazz
mainstream (son dieu, Louis Armstrong, étant au-dessus de tous les partis). Il
n'a pas du tout soutenu le prétendu «Revival» (Bunk Johnson, George Lewis,…) à
deux exceptions près: l'orchestre régulier de Kid Ory et… Les Lorientais de
Claude Luter. Contrairement à une légende, ce n'est pas à cause d'un bop, re ou
be, qu'Hugues Panassié quitte la revue Jazz Hot dont il est le directeur
et Charles Delaunay, le rédacteur en chef, mais parce qu'on y parle trop, selon
lui, de Bunk Johnson. Reprenez vos Jazz Hot. Dans le n°10
de septembre 1946, Panassié y est toujours directeur (page 3) et en
effet, Frank Bauer nous parle de Bunk Johnson (avec une photo, p.4). Dans le
numéro 11 suivant, de cette 12e année, 2e série, page 3, le directeur Panassié
a disparu. Il y avait aussi quelques autres raisons, mais pas celle que l'on
invoque toujours. D'ailleurs ne lit-on pas p.66, du n°2 de La Revue du
Jazz, en février 1949, un article consacré à Charlie Parker, dans la
rubrique «Les rois du jazz», signé du directeur en chef, Hugues Panassié (il est
bien question de «Ko-Ko», «Ornithology», «Night in Tunisia» en Dial et Blue
Star).
Pour
illustrer, le genre new orleans au programme du premier Festival de Jazz, du 22
au 28 février 1948, à Nice, Hugues Panassié a convié Les Lorientais de Claude
Luter qui partagent ainsi l'affiche avec, pour faire court, l'incontournable
Mezz Mezzrow qui a amené les fantastiques néo-orléanais Pops Foster et Baby
Dodds, le groupe de Rex Stewart, Django et Stéphane Grappelli, le soliste Lucky
Thompson, Bobby Jaspar (avec Jean Leclère), Humphrey Lyttelton et, le boss,
Louis Armstrong avec son All-Stars (dont Barney Bigard, cl). Louis n'était pas
venu en France depuis 1934. Tous les Américains arrivent en avion spécial à
Orly le 20 février 1948 où ils sont accueillis par l'orchestre d'Aimé Barelli, puis,
ils se rendent à Nice en train. Cette fois, à la gare, ce sont Les Lorientais
qui les accueillent. C'est une expérience considérable pour Christian Azzi! Qui
d'ailleurs aura ainsi l'occasion de jouer avec Baby Dodds, Pops Foster, Barney
Bigard, Jimmy Archey et d'autres. Toutefois, par contrat, Louis Armstrong
n'avait pas le droit de faire des jam sessions. C'est pour cela que je
n'utilise pas le terme «revival» car tant qu'une transmission directe est
possible –et c'est le cas à cette époque– l'expression est impropre sur le plan musicologique. Le festival a débuté le dimanche 22 février 1948 et à 15h30, les
techniciens du son ont réuni tous les orchestres. Le Festival
de Nice a été un succès artistique. Trois prestations en public des Lorientais à
Nice ont survécu sur acétate, un blues et deux interprétations de «Chattanooga
Stomp». Dans le «blues», ils semblent galvanisés. Pierre Merlin joue avec
beaucoup de drive. De quoi plaire à Louis Armstrong. Mais, Christian Azzi ne
prend pas de solo dans ces morceaux. Toujours à Nice, avant leur départ, Les
Lorientais gravent quatre morceaux pour le label Le Disque Harmo Miroir de
l'Harmonie (ça ne s'invente pas). Dans «Sport Model Mama» la section rythmique
est bien enregistrée et l'on peut entendre correctement le travail
d'accompagnement du pianiste, excellent derrière le bon solo de clarinette dans
le registre grave et le solo avec sourdine de Merlin. Les Américains et Claude
Luter repartent par avion, tandis que les autres musiciens dont Christian Azzi
retrouvent Paris par le train. Le 1er
mars 1948, Hugues Panassié a amené Louis Armstrong et Earl Hines au club des
Lorientais parce que l'orchestre de Claude Luter rappelle des souvenirs de
jeunesse à Satchmo. Nous avons signalé Aimé Barelli, ce qui mérite un mot de
l'attitude des vedettes françaises du jazz d'avant et pendant l'Occupation
devant la déferlante des jeunes convertis au new orleans. Christian Azzi l'a
confirmé, ils n'étaient pas aimés. Azzi a fait quelques bœufs avec André Ekyan,
mais en gros l'équipe Luter était «trop amateur» pour ces très bons
instrumentistes. Par ailleurs, on pouvait lire chez les partisans d'un genre
qui s'oppose à eux que la jeunesse doit aller vers le «nouveau». A Nice, le Boss,
Louis Armstrong, aura certes bientôt 47 ans, ce qui est dramatique, à en croire
certains! Mais Christian Azzi et Bobby Jaspar ont le même âge, 22 ans. Tout
comme Luter, 25 ans, ils sont plus jeunes que Parker et Gillespie,
respectivement 28 et 31 ans. Il n'y a pas de «de style de génération».
Le lundi 8
mars 1948, Les Lorientais enregistrent six classiques du jazz pour le label
Pacific, dont un «West End Blues» qui ne doit rien à Louis Armstrong (trop
risqué) mais qui s'inspire de la version méconnue de Jelly Roll Morton gravée
en 1939. Christian Azzi y prend un solo, court mais bon. Pour lui, on retiendra
aussi «Where Did You Stay Last Night?» où il joue des passages à découvert. La
qualité d'enregistrement ne cesse de s'améliorer même si les diverses parties
instrumentales ne sont pas bien équilibrées. La maison Pacific, sollicite
l'orchestre pour une deuxième séance qui prend place le mardi 25 mai 1948.
Michel Pacout est mieux enregistré qu'il ne l'a été jusque-là par les autres
compagnies de disques. Le «Trouble in Mind» est joué avec beaucoup de feeling, et l'accompagnement de Christian Azzi est dans le style de Richard M. Jones. On
appréciera aussi son travail dans «Jackass Blues». Du 10 au 17 mai 1948, c'est
la Grande Semaine du Jazz au Théâtre Marigny organisée par Jazz Hot. Au cours de cet événement, le 14,
un spectacle appelé «Nouvelle Orleans contre Be Bop», animé par Boris Vian,
oppose l'orchestre de Claude Luter à celui d'Howard McGhee. Rien d'original.
C'est l'imitation, sans «retard» significatif, d'une pratique lancée pour la
radio en septembre 1947, à New York, par Rudi Blesh et Barry Ulanov consistant
à confronter respectivement selon leur choix, un orchestre «traditionnel» (Wild
Bill Davison, Edmond Hall) à un orchestre «bebop» (Dizzy Gillespie, Charlie
Parker). Cette «bataille» est volontairement entretenue au grand bénéfice
publicitaire des extrêmes, le «jazz traditionnel» et le «bebop», et aux dépens
de l'entre-deux, le «mainstream» (Bill Coleman, Coleman Hawkins, etc). En tout
cas, le choix de Boris Vian montre la considération atteinte par l'orchestre de
Claude Luter, dont Christian Azzi est le pianiste, avant même qu'il s'accroche
à une «locomotive» néo-orléanaise. L'opposition des genres perdurera parce que
certains y ont intérêt. Le curseur de la contestation se déplacera: en 1952, Salle Pleyel, une part du public siffle le trompette Peanuts Holland vedette de
l'orchestre Michel Attenoux, jugé trop moderne puis, le 21 mars 1960, on
sifflera John Coltrane que Miles Davis a amené à l'Olympia. Pour les
comportements, il n'y a pas de nouveauté, puisque, par exemple, «on» a sifflé
le Sacre du Printemps d'Igor Stravinsky lors de sa création en 1913 au
Théâtre des Champs-Elysées. D'ailleurs, c'est plus vivant et plus franc que le
consensus mou du public inculte des festivals dits de «jazz» au XXIe siècle jusqu'en 2019.
Grâce à la
notoriété acquise au Festival de Nice, Les Lorientais donnent beaucoup de bals
et de concerts, et les séances d'enregistrement s'enchaînent. L'une d'elles est réalisée le 23 juin 1948 pour une autre figure historique et dynamique du
disque, Eddie Barclay, alias Edouard Rouault (1921-2005), pour son label Blue
Star (créé en 1945). Ces disques Blue Star par l'équipe Luter sont qualifiés d'«assez prometteurs» par Hugues Panassié (La Revue du Jazz n°1, janvier
1949, p.20). La partie de piano de Christian Azzi est bien enregistrée dans «Sweet
Lovin' Man». Si Charles Delaunay invite cette équipe à participer à ses
concerts Jazz Parade au Théâtre Edouard VII, les prestations se
poursuivent aussi au club des Lorientais jusqu'au 2 novembre 1948. Un problème
de non-conformité aux règles de sécurité, à savoir l'absence d'une sortie de
secours, a conduit à la fermeture de l'établissement. L'orchestre est alors
engagé, grâce à Boris Vian, pas loin, au club Kentucky situé 2, rue Valette (Ve arrondissement). Jacques Becker y
passait beaucoup de temps avec les membres de l'orchestre qui fut par ailleurs
remarqué aussi par Anet Badel, propriétaire du Vieux-Colombier, situé 21, rue du
Vieux-Colombier (VIe arrondissement).
Christian Azzi se souvint qu'au cours de l'année 1948, Becker avait déjà l'idée
de tourner un film sur la jeunesse d'après-guerre. Luter, Azzi et les autres
restent au Kentucky jusqu'au milieu du mois de janvier 1949 date de l'ouverture
du Vieux-Colombier qu'ils font. Au cours d'une première séance pour la maison
Selmer en décembre 1948, vers le 10, Christian Azzi prend un bon solo dans «Babouche»
qu'il a composé et dans les prises de «Wolverine Blues», dédiées à Louis
Armstrong, dont la quatrième fut cédée par Ducretet-Thomson. Au cours de la seconde
séance des Lorientais pour Selmer fin décembre, Christian Azzi assure un bon
solo dans «Willie the Weeper». Luter a toujours joué des instruments Selmer et, à cette époque jusqu'en 1954, la compagnie réalisait des disques de ses
artistes fidèles (Maurice Mouflard, Raymond Sabarich, Marcel Mule, Gabriel
Masson). Tous les titres des Lorientais et en quartet (cf. infra) furent aussi
publiés en 33t.-25 cm Ducretet-Thomson 250V000. En mai-juin 1949, Christian
Azzi tourne la scène où il joue avec Rex Stewart et l'Orchestre Claude Luter
dans le film Rendez-vous de Juillet de Jacques Becker, sorti en salles
le 6 décembre suivant. Le tournage s'est fait en studio, et le Caveau des
Lorientais a été reconstitué à l'identique. Ce n'est pas le pianiste qu'on
voit le mieux.
En marge de
toute cette production, il y a deux morceaux enregistrés en trio par Luter avec
Azzi et Pacout (mai 1948, label Jazz Record Society), sortis sous le nom du
batteur, et deux autres, «Moustache Stomp», «Riz à la Créole» en quartet sur 78t. Selmer (Luter, Azzi, Roland Bianchini, b, Moustache). En janvier
1948, est fondée l'Association des Amis de la Nouvelle Orléans, au 29, rue Dulong (XVIIe arrondissement) et, en octobre de la même année, elle devient la Jazz Record Society, placée sous le
patronage du Hot Club de France. Dès lors, elle sort environ un disque par mois
en tirage limité à 150 exemplaires réservés à ses adhérents, pour 100 francs
l'exemplaire. Le premier disque est une nouveauté: le trio Michel Pacout qui
permet de mieux apprécier le jeu de Christian Azzi. L'esprit des trios de Jelly
Roll Morton notamment celui du maître avec les frères Dodds fut à n'en pas
douter l'inspiration de ces deux morceaux, bien enregistrés: «Domino Stomp» et «122
Blues». Claude Luter joue avec un très bon feeling sur des tempos détendus et
les solos de Christian Azzi, sobres, se détachent d'une influence précise. Pour
la première fois, il brille en disque. C'est une excellente séance, et on
remarque que Claude Luter écrit de bons thèmes, ce que confirme la séance Selmer
en quartet. Christian Azzi est excellent chorusman dans «Moustache Stomp» (à
une fausse note près en fin solo) et «Riz à la Créole». Ces musiciens français
ont bien progressé en style et technique en l'espace de deux ans, et ils
monteront plus haut encore dans l'ombre d'un géant.
L'impensable
arrive, en effet. L'Orchestre Claude Luter accompagne Sidney Bechet au Festival
International de Jazz qui s'est tenu à Paris du 8 au 15 mai 1949, Salle Pleye, promu par Jazz Hot.
On sait le succès remporté par le showman Sidney Bechet qui, selon tous les
témoins, a fait de l'ombre à toutes les autres têtes d'affiche, non des
moindres. Bechet est une locomotive et les orchestres de Claude Luter et du
jeune Pierre Braslavsky (1930-1995) doivent suivre! Le cornettiste Pierre
Merlin ne peut pas tenir cette déferlante et, en octobre 1949, il quitte l'équipe
Bechet-Luter dont Azzi est toujours le pianiste en titre. Merlin rejoint
quelques mois plus tard le clarinettiste Pierre Atlan (1928-1988). En dehors de
«When the Saints» joué lors du Festival International de Jazz de Paris, et
publié en disque, il y a «Blues in the Cave» joué en octobre 1949 au Théâtre
Edouard VII, à Paris, qui a été édité en disque. Pour ce concert Sidney Bechet
alterne avec l'orchestre de Pierre Braslavsky, trois fois, et celui de Claude
Luter, deux fois (Vogue COP 210). Outre Luter et Azzi, l'orchestre comprend
Pierre Dervaux, Claude Philippe (tp), Christian Viénot de retour (tb), Roland
Bianchini (b), François «Moustache» Galépidès (dm). La première vraie séance de
Christian Azzi avec Bechet et Luter a pris place peu après, le 14 octobre 1949.
Elle a donné «Les Oignons» que Bechet s'est attribué; un tube grâce à la
télévision (émission de cuisine de Raymond Oliver) auquel, très jeune, je
préférais déjà «Bechet's Creole Blues» sur le même 45t. Vogue EPL 7015 que
possédait mon père: courte et simple introduction de piano puis Bechet clame
avec un lyrisme incroyable, du drive, du growl. Aucun imitateur –et ils sont nombreux– n'approche cette dimension expressive. On ne pouvait pas
savoir la participation de Christian Azzi car la pochette comme pour les
disques de variétés n'indique pas le personnel, ni la date. Ce personnel est le
même sauf que Mowgli Jospin a repris sa place au trombone à coulisse
(glissandos dans «Panther's Dance» qui n'est autre que «Tiger Rag). «Buddy
Bolden Story» débute par un dialogue parlé en français entre Bechet et Luter gracieusement accompagnés par Azzi, puis l'orchestre entame le «Buddy Bolden
Blues» de Morton en collectif avec un Bechet dominant. L'accompagnement d'Azzi
est simple et efficace dans «Anita's Birthday» qui s'apparente à «The
Hucklebuck» et «Now's the Time». Bechet savait exactement ce qu'il voulait et
l'imposait à ses musiciens qui ne sont pas aussi insignifiants qu'on l'a dit.
Ils sont juste submergés par le tempérament de feu du leader. Bien des
productions de «jazz traditionnel» d’aujourd’hui sont musicalement inférieures.
Nous aimons bien «Blues in Paris» (prise 2), blues joué magistralement d'un
bout à l'autre par Sidney seulement accompagné par Azzi (bien), Bianchini et
Moustache. Sidney Bechet aimait le jeu de Christian Azzi qu'il appelait «Cliff
Jackson», ce qui n'est pas un mince compliment. Exagéré bien sûr car les Hank
Duncan, Cliff Jackson pour ne rien dire des maîtres (James P. Johnson, Fats
Waller, Willie Smith Le Lion) et même des oubliés (Clarence Profit, Herman
Chittison, les particuliers mentaux Garnet Clark et Cassino Simpson) sont d'une
dimension tellement considérable.
Christian
Azzi a enregistré environ 100 titres avec Sidney Bechet d'octobre 1949 jusqu'au
concert de la Salle Pleyel du 12 mars 1952. A l'exception de la retransmission
de l'émission de Charles Delaunay, Jazz Parade, de janvier 1950 (Vogue
COF22C) et d'un concert enregistré en Suisse, à La Chaux de Fonds, le 4
novembre 1950 (Vogue COF24C et 25A), tous les titres, sauf les prises
alternatives, de l'équipe Bechet-Luter avec Azzi, des séances du 14 octobre
1949 au 18 janvier 1952, figurent dans le coffret de 4 CDs Trésors Sidney
Bechet, Vogue 7432846522, sorti en 2001, dont le seul problème est
l'absence d'indications de personnel. Le non initié ignorera que Christian
Azzi y déploie son talent. La seconde séance de Bechet avec l'équipe Luter, en
studio, date du 15 novembre 1949 et débute par un vigoureux «Temptation Rag».
Nous apprécions le «Sobbin' and Cryin'», blues joué en duo Bechet (ss) et Luter
(cl) avec la rythmique sans banjo. Azzi possède un jeu d'une simplicité exemplaire
qui fait du bien à (ré)entendre de nos jours! Moustache n'est pas le ridicule
que l'on croit. Son drumming est idiomatique comme dans ce «Struttin' With Some
Barbecue» dans lequel Luter prend un solo sympathique, et où Bechet avec ses
notes tenues a un panache incroyable bien qu'il lui manque la majesté impériale
de Louis Armstrong. Sous l'influence de Bechet, Luter a modifié son vibrato, et
il a aussi acquis plus de lyrisme («Saw Mill Blues»). Il glisse vers une
synthèse des styles Dodds et Bechet. Ce que confirme «Ni queue ni tête», un
blues gravé en septembre 1950. Dans l'ensemble, Pierre Dervaux (tp) et
l'excellent Bernard Zacharias (tb) sont réduits à peu de chose, le seul
co-soliste est Luter. Même Christian Azzi n'a guère l'occasion de briller en
solo. Le 6 octobre 1950, c'est une autre séance pour Vogue qui donne la célèbre
démonstration de virtuosité de Sidney Bechet à la clarinette dans «Moulin à café». Bernard Zacharias, bien accompagné par Azzi, intervient dans «Careless
Love Blues». «Francis Blues» est l'occasion d'un bon solo avec plunger de
Pierre Dervaux et l'accompagnement de Christian Azzi est excellent notamment
derrière le patron. Enfin «Casey Jones» offre un solo de Christian Azzi discrètement
influencé par Willie Smith Le Lion, puis un rageur solo de Zacharias et la maîtrise
du patron. Les mêmes musiciens font une séance supplémentaire trois jours plus
tard, le 9, au cours de laquelle Christian Azzi montre qu'il s'est adapté aux
rythmes créoles («Lastic», «Madame Bécassine»). C'est le métier qui entre. Azzi
est maintenant rodé pour accompagner dans le blues («Society Blues»), mais il
est aussi très à l'aise dans les solos en stride: «Bill Bailey, Won't You
Please Come Home» et «Royal Garden Blues»: grand libéral, Bechet y laisse tous
les souffleurs prendre un court solo et pour le batteur, un break!
Avec la star
du soprano, Azzi a non seulement joué à Paris mais aussi, régulièrement, à
Juan-les-Pins, à l'autre Vieux-Colombier, boulevard de la Pinède. Selon Christian Azzi, Sidney Bechet
voulait du spectaculaire avec des tempos très rapides en concert, et une
musique plus détendue pour les danseurs du Vieux-Colombier comme Jean-Pierre
Cassel avec Simone, la compagne de Moustache. A peine plus tard, l'étiquette «rock
& roll» prendra le relais de la danse. On ignorait encore qu'un Fats
Domino, Louisianais, sortait déjà en 1949 des disques terriblement dansants
trempés dans le blues. Un genre pas si éloigné de celui des pianistes Big Maceo
(1903-1953) et autre Joshua Altheimer (1910-1940). Mais ce blues de base est
encore mal connu en France, malgré la parution dans la revue Jazz Hot n°3, en décembre 1945 du premier article sur le sujet, signé
Albert McCarthy et la venue du pianiste Pete Johnson (1904-1967) au Festival
International de Jazz de Paris en mai 1949. Ce n'est pas avant cette grande
période du Vieux-Colombier, en 1951, que Charles Delaunay et Léon Cabat
(1922-2005) commencent à sortir des disques de blues chez Vogue, et que, de son
côté, Hugues Panassié publie dans son Bulletin du Hot Club de France une
série «pianistes de blues» (avril et mai 1951). En France on connait mieux les
Earl Hines (Nice, Paris, 1948), Willie Smith Le Lion (en tournée pour le Hot
Club de France de décembre 1949 à janvier 1950) et peut-être le sous-estimé
aujourd'hui Charlie Lewis (celui du solo dans «Because of You» par Bechet,
janvier 1952). Christian Azzi porte aussi une oreille attentive aux pianistes
Duke Ellington et Count Basie dont on n'entend pas l'influence dans ses disques
de cette époque. Cabat et Delaunay ne lâchent pas Sidney Bechet dont le succès
est exceptionnel, et, le 4 mai 1951, Christian Azzi retrouve le studio avec
lui. C'est curieusement le trompette Guy Longnon qui remplace Zacharias au
trombone. Sans être un grand technicien, il prend un solo bien construit dans «Promenade aux Champs-Elysées», assure
sans broderie dans «Wolverine Blues» de Morton et, surtout, il joue une touchante
introduction dans «En attendant le jour» (typique sonorité de trombone à
pistons). Et Christian Azzi dans tout ça? Il est dans l'ombre du patron. Même
sa jolie introduction à «Blues in the Cave» est derrière la voix explicative de
Mr. Bechet. En concert, Moustache devait commencer le show, puis Sidney Bechet
arrivait en scène tout en jouant ce qui enclenchait le délire dans le public.
Bechet voyageait avec ses musiciens et descendait dans les mêmes hôtels.
L'orchestre utilisait plus le train que l'avion. Mais c'est en bateau que
Bechet et les musiciens de Luter dont Azzi sont allés jouer en Tunisie.
Enfin au
cours de cette première étape de carrière, Azzi a aussi réalisé pour Vogue et
avec l'Orchestre Claude Luter une séance pour Mezz Mezzrow, huit titres en dix
prises dont un beau «Black and Blue» ainsi que deux séances de l'Orchestre
Luter sans invité (24 janvier 1950 et 6 février 1951). Azzi a su retenir
l'attention de Charles Delaunay qui lui donne sa chance en lui faisant
enregistrer quatre faces de 78 tours en solo, le 6 février 1951 juste après une
séance de l'Orchestre Luter. Pour le lancer, on a couplé un titre par Luter et
un par Azzi sur les 78 tours Vogue V5086 («Rag de dent»/piano solo: «Squeeze Me»)
et V5087 («Working Man Blues»/piano solo: «Belon Rag»). Le troisième disque ne
doit qu'à Azzi sur Vogue V5116 («You Wichin' You»/«One Way Stomp»). Ces solos
de piano n'ont, à ma connaissance, jamais été réédités. Le grand spécialiste du
piano stride, Joe Turner (1907-1990), les a beaucoup appréciés. On oublie trop
une séance de la formation de Claude Luter avec l'excellent trompette Nelson
Williams, le 20 décembre 1951. Et, sans Luter, Christian Azzi en compagnie de Guy
Longnon (tp), Roland Bianchini (b) et Moustache, grave quelques titres cette
même année pour le grand sax ténor Don Byas. On leur a donné le nom des
Saratoga Jazz Hounds. Le 18 février 1952, Christian Azzi retrouve Sidney Bechet
en studio avec l'équipe de Luter. Guy Longnon a remplacé Dervaux à la trompette
tandis que Zacharias a retrouvé sa place au trombone. Christian Azzi prend un
joli solo en stride dans «Strike Up the Band» et un passage en solo
impeccable que, semble-t-il, Bechet lui a dicté, dans «As-tu le cafard?». Cette
séance fut une usine à tubes: le beau «Si tu vois ma mère», mais aussi «Le
marchand de poissons» et l'incontournable marche pour les défilés, «Dans les
rues d'Antibes». Evidemment, comme le signataire, on peut préférer le géant Sidney
Bechet à la clarinette et dans ses disques RCA et Blue Note gravés aux
Etats-Unis, avec les Rex Stewart, Charlie Shavers, Sidney de Paris, Bunk
Johnson, Jonah Jones, Vic Dickenson, Sandy Williams, Jimmy Archey, Sonny White,
Earl Hines, Willie Smith Le Lion, Cliff Jackson, Pops Foster, Wellmand Braud,
Walter Page, Kenny Clarke, Sid Catlett, Baby Dodds, Manzie Johnson, Freddie
Moore. Néanmoins, Bechet est un grand professionnel, et ces disques avec Claude
Luter ne sont pas mauvais, même s'ils sont parfois complaisants.
Jean-Christophe Averty (1928-2017) estimait floue la frontière entre le jazz
et les variétés. Le grand Sidney aussi populaire et aimé qu'Edith Piaf, a joué
sur ça. Mais des variétés comme celles-ci, on peut les regretter aujourd'hui.
En mai 1952, Christan Azzi quitte Sidney Bechet et Claude Luter pour
effectuer son service militaire en Allemagne. On note cependant que pour le
concert Bechet-Luter à la Salle Pleyel, le 12 mars 1952, toutes les
discographies, pochettes et livrets de CD indiquent Raymond Fol au piano. Parce
qu'on n'écoute pas! Or dans la présentation des musiciens, Charles Delaunay
nomme Christian Azzi au piano! Et il est, au cours de ce concert survolté, en
grande forme et Sidney lui offre plein de solos («Muskrat Ramble», «I've Found
a New Baby», «St Louis Blues», etc). Cet enregistrement est le meilleur de
Christian Azzi avec le grand homme (4 concerts de jazz de légende, EMI
8661972 3). Une fois démobilisé, Christian Azzi a eu l'occasion de jouer pour
le superbe clarinettiste louisianais Albert Nicholas arrivé en France en 1953. Christian
Azzi s'oriente vers d'autres activités, à la radio (Europe 1) et la télévision. Il ne revient à la musique qu'en 1965.
Comme Luter et Merlin, Christian Azzi était
là au bon moment en 1947-52. A son retour en scène, il est à nouveau là à un
moment opportun. Alors que le genre «traditionnel» ne s'est jamais éteint
depuis 1946, juste moins médiatisé pour un temps, un rebond d'intérêt, improprement appelé une fois de plus «revival», se produit en France mais
aussi en Argentine (la Porteña Jazz Band, 1964), Suisse, Suède et ailleurs.
L'autre constatation que l'on doit en tirer, c'est que ce phénomène prouve une
fois encore qu'il n'y a pas de «style de génération» (comme le voudrait le
milieu progressiste). Ici, arrivent sur scène des jeunes qui selon cette idée
aussi idiote que tenace auraient dû opter pour la «New Thing». Ils sont nés
entre 1942 (Michel Bastide) et 1946 (Marc Richard), par exemple, c'est à dire
au cours du lancement mondial du (premier) «jazz traditionnel». Et la
transmission directe reste possible: Irakli fait la première partie du concert
de Louis Armstrong au Palais des Sports de Paris (4 juin 1965), Dan Vernhettes
joue avec les clarinettistes Willie Humphrey (1967) et Albert Nicholas (1968),
pour ne rien dire de la tradition Bechet à travers les nouveaux vétérans Claude
Luter, Raymond Fonsèque, René Franc, Christian Azzi et d'autres. Deux personnes
ont en France, un rôle de catalyseur: Gérard Conte (1931-2012), inventeur du
Jazz Band Ball, producteur des disques Afajno (à partir de 1963) dont parle Jazz
Hot, ancien de l'équipe de Jazz Hot, et le tromboniste Raymond Fonsèque (1930-2011) qui prend en main le
Jazz Club de France (1966), et qui est le programmateur cherchant l'équilibre
entre jeunes et vétérans, au Caveau de La Huchette (1966 à 1969). Ce n'est pas
socio-artistiquement de la même importance qu'en 1947-52, mais cette vague a
existé. Christian Azzi amène de la crédibilité du fait d'un background glorieux
comme c'est aussi le cas pour Claude Luter, Maxim Saury, Raymond Fonsèque, les
vétérans du High Society Jazz Band. Les divers chefs d'orchestre de Christian
Azzi lui accordent volontiers un ou deux morceaux en vedette sans le concours
des souffleurs. Marque de respect pour son talent, sa stature historique et sa
culture du piano jazz. Il vivra donc l'enthousiasme résiduel des trente cinq
dernières années du XXe siècle pour
une animation musicale ludique, souvent festivalière, avant qu'elle ne
s'éteigne progressivement et inéluctablement. Le comeback de Christian Azzi se
fait «à la maison» pourrait-on dire. Comme il l'a confié à Jean-Pierre
Battestini, il a joué de 1965 à 1989 au sein du High Society Jazz Band (HSJB). Soit,
souvent, l'instrumentation avec deux cornets du Creole Jazz Band et des
Lorientais: Pierre Merlin avec Claude Rabanit puis d'autres. Cet ensemble
généralement oublié des spécialistes a été fondé en 1947 par le clarinettiste
Pierre Atlan, rejoint par l'ex-Lorientais Pierre Merlin trois ans plus tard.
Il est relancé en 1954 par Mowgli Jospin. Puis, pour faire court, c'est Daniel
Barda qui remplace Jospin en 1967. Le problème est que Martine Morel
(1930-1986) est la pianiste titulaire du HSJB depuis 1955. Mais Azzi n'a pas tout
faux, car il est le remplaçant de Martine Morel, bonne spécialiste du ragtime,
tout comme, plus rarement, l'ineffable Jean-Christophe Averty, par exemple dans
son émission télévisée Ces merveilleux fous du jazz (9 février 1974).
Incidemment l'HSJB est un des orchestres préférés d'Averty qui, à sa façon,
donnait à voir de la musique de qualité sur le petit écran. On sait que c'est
Azzi qui remplace Morel en concert en avril 1978, et c'est lui qui lui succède
en effet. Avec cet historique HSJB, Christian Azzi participe à des émissions de
radio et de télévision ainsi qu'à un CD pour le label américain, Stomp Off,
compagnie consacrée au «jazz traditionnel» (mai 1987). Avec Le HSJB, Christian
Azzi a fait une tournée aux Etats-Unis (Chicago, New Orleans et New York).
Parallèlement,
pour «Prière sur la vie», Christian Azzi accompagne l'abbé Guy de Fatto pour un
disque (1969), et il a fait une prestation, en tant que remplaçant de Philippe
Baudoin, avec les Jazz O'Maniacs de Dan Vernhettes au Festival d'Antibes
(1969). Là encore, Christian Azzi est «à la maison», car Vernhettes, admirateur
de Pierre Merlin et du HSJB, a animé avec Michel Devilliers (élève d'Arthur
Briggs) cette tradition à deux cornets du «jazz classique». Dès 1972, Christian
Azzi retrouve Maxim Saury pour des disques. Avec Saury, il enregistre en
septet, d'abord avec Pierre Sellin (tp), Benny Vasseur (tb), Roland Lobligeois
(b) et Armand Molinetti (dm) des titres comme «West End Blues», «Cornet Shop
Suey», «Dippermouth Blues», «Egyptian Fantasy» (Jazz
Story, vol.1, Véga 16328), «King Porter Stomp» (Jazz Story, vol.2,
Véga 16329). La direction artistique de ces albums était confiée à Danel Barda.
C'est aussi avec une équipe de Maxim Saury qu'il enregistre la même année un
disque sous le nom de Christian Morin, au studio de Vincennes en compagnie
d'Alain Bouchet (tp), Didier Hussenot (tb), Marcel Cazes (cl), William Azoulay
(g), Jacques Gervais (b) et Roger Peguet (dm).
A partir de
1985, Christian Azzi devient membre du Watergate Seven+One des frères
Marcheteau, Alain (bj) et Michel (tu), dont le «port d'attache» est le Petit
Journal Saint Michel à Paris. Une fois de plus, Christian Azzi est «à la maison»
puisque cet ensemble au nom étrange se veut dans la continuité du non moins
étrangement baptisé Yerba Buena Jazz Band du trompette Lu Watters qui à partir
de 1939, devient une réplique du Creole Jazz Band, donc avec, au début, une
front-line à deux trompettes (Bob Scobey étant l'autre). Il y a donc deux
trompette/cornet dans le Watergate Seven+One: le vétéran Marcel Bornstein (tp)
et Michel «Bouzou» Peslier puis Marie-Christine «Kiki» Desplat (cnt). Outre des
disques, l'orchestre fait des tournées (Antilles, Etats-Unis) et participe à
des festivals (Sacramento, Breda). En 1992, Christian Azzi tourne en Suisse
avec le clarinettiste suisse Jacky Milliet et la banjoïste Cynthia Sayer. Et en
novembre 1992, il co-fonde les Yellow Dogs. Cet ensemble a enregistré le
contenu d'une cassette autoproduite par Christian Azzi, à Paris, au studio
Carfat, le 26 février 1993, sans doute impossible à trouver aujourd'hui (The
Yellow Dogs. Famous Jazz Band). Il retrouve son environnement préféré,
le jazz band à deux cornets (ou trompettes). Outre Azzi, il y a Patrick
Bacqueville (tb, voc), Marc Richard (as, cl, voc), François Fournet (g, bj),
Michel Marcheteau (tu) et le solide tandem trompette/cornet emprunté au
Watergate Seven+One: Marcel Bornstein et Kiki Desplat. Après les vocaux,
Christian Azzi s'exprime en solo stride sur «Sweet Emmalina» (suivent de bons
solos, l'un teinté de Jimmie Noone par Marc Richard et l'autre à la Bix par
Kiki). Marcel Bornstein mène avec conviction dans «Yellow Dog Blues», mais
Christian Azzi cède le solo au banjo de François Fournet. On apprécie
l'accompagnement de Christian Azzi derrière le solo de Bacqueville dans cette
bonne version de «Candy Lips». Azzi n'est pas audible dans le low down «Red
River Blues». En revanche, on peut apprécier son jeu dans l'accompagnement de la
partie chantée par Bacqueville dans «Make Believe». Il nous propose un
excellent solo dans «Who's Blue?» où Kiki est plus proche de Bix que de King
Oliver. Le dernier titre est le «Don't You Leave Me Here» du merveilleux Jelly
Roll Morton, chanté par Kiki avec un bel accompagnement de Christian Azzi. On
ne peut pas dire que Christian Azzi tire la couverture à lui. Il joue ensuite
et à nouveau régulièrement pour Jacky Milliet.
En 1994,
Claude Luter lui demande de succéder à Yannick Singéry (1929-1995). Ils jouent
à Marciac, notamment pour une spectaculaire «carte blanche à Claude Luter» aux
arènes le 15 août 1996: Eric Luter, Michel Bonnet (tp), Benny Vasseur (tb),
Claude Luter, Jacques Gauthé (cl, ss), Claude Tissendier (cl, as), Azzi (p),
Michel Marcheteau (tu) et Poumy Arnaud (dm). Luter est revenu aux arènes de
Marciac le 13 août 1997 avec Vasseur, Azzi, Marcheteau, Arnaud et en invité
Alain Marquet (cl). Christian Azzi est resté avec Claude jusqu'en 2000. Il
participe à son dernier disque, pour Blue Moon, avec Vasseur, Marcheteau et
Arnaud (2001). En avril 2000 jusqu'en 2005, il est le pianiste du Paris
Washboard de Daniel Barda pour les tournées, car le titulaire, le radiologue
Louis Mazetier, ne trouve pas assez de temps pour ça. Avec cet ensemble, il
joue au festival d'Ascona en 2000. Le 4 juillet, au Seeschloss, fatigués parce
qu'à peine arrivés de Toronto, les musiciens du Paris Washboard se sont
produits avec deux invités: Patrick Artero (tp) et Daniel Huck (as) («Squeeze
Me»). Nous avons aussi vu Christian Azzi à Marciac en 2000 et 2001 avec Poumy
Arnaud. D'abord avec Boss Quéraud (tp), Michel Camicas (tb), René Franc (ss,
cl) et Jack Sewing (b). L'année suivante Franc et Sewing étaient remplacés par
Jacques Montébruno (cl) et Alphonse Masselier (b) («Boppin' & Moppin'», «Moulin
à café»). Au printemps 2002, Christian Azzi a succédé à Ralph Sutton dans un
trio avec Reimer von Essen (cl) et Trevor Richards (dm).
Christian Azzi (p), Claude Luter (ss), Jacques Gauthé (cl), Claude Tissendier (as), Michel Marcheteau (sousaph),
Eric Luter (tp), Michel Bonnet (tp), Poumy Arnaud (dm), Benny Vasseur (tb),
15 août 1996, Marciac © Lisiane Laplace
Le quartet Jazz Clan de Poumy Arnaud avec
Azzi, Marquet et Masselier, fondé en 2001, est devenu le Sidney Bechet Memory.
Cet orchestre que Poumy co-dirige avec Christian Azzi regroupe Benoît de
Flasmesnil (tb), Olivier Franc (ss), Alain Marquet (cl) et Alphonse Masselier
(b). C'est la dernière étape de la carrière bien remplie de Christian Azzi.
Azzi, Bornstein, Masselier et Poumy ont de bonnes raisons de vouloir passer le
flambeau que le grand artiste Sidney Bechet leur a confié. Certes, les manières
du temps ont bien changé. Les jeunes déformés par un enseignement tendancieux,
n'ont dans l'ensemble pour les vétérans ni curiosité, ni respect. L'un des
derniers concerts de Christian Azzi avec le Bechet Memory a eu lieu au Petit
Journal Saint Michel le 14 mai 2019.
Michel Camicas (tb), Christian Azzi (p), Boss Quéraud (tp), Jacques Montébruno (cl),
le 5 août 2001, Marciac © Lisiane Laplace
Sa
petite-fille Juliette Prevost nous a appris que Christian Azzi en avait «assez
de ne plus pouvoir vivre cette vie incroyable qu'il a eu autrement qu'avec
assistances et douleurs». Il s'est donc retiré dix jours avant l'anniversaire
de ses 94 ans. Ses obsèques ont eu lieu le lundi 30 novembre 2020 au Cimetière
Montparnasse dans la stricte intimité familiale compte-tenu des conditions
sanitaires du moment. Jazz Hot présente ses sincères condoléances à Catherine Azzi son
épouse, à son fils Sébastien, à sa petite-fille Juliette Prevost et à tous ceux
pour qui Christian Azzi était cher.
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SELECTION DISCOGRAPHIQUE
Leader/coleader
78t 1951. Christian Azzi. Vogue 5516
78t 1951. Claude Luter/Christian Azzi. Vogue V5087
K7 1993. The Yellow Dogs. Famous Jazz Band, demo hors commerce
CD 2001. Poumy Arnaud & Christian Azzi, Jazz Clan: Live in Megève,
Cordiboy CAPA 01
CD 2003. Poumy Arnaud & Christian Azzi, Sidney Bechet Memory, Cordiboy
CAPA 02
Sideman
78t 1947. Claude Luter et son Orchestre, Just Gone Blues/Graveyard Dream Blues, Swing 268
LP 1948. Claude Luter et ses Lorientais, Pacific 167
LP 1948. Claude Luter et ses Lorientais, Ducretet-Thomson 250V000 (=CD 1947-49. Claude Luter & Les Lorientais –incl. Michel Pacout trio–
Intégrale, Memories 13-14-15)
LP 1949. Sidney Bechet with Claude Luter et ses Lorientais. A document from
the Paris Jazz Festival, Phontastic Nostalgia 7602 (=CD 1948-51. Claude Luter. Jazz à St Germain, Soldore SOL 581) CD 1949. Sidney Bechet. 1949, vol.2, Classics 1186
45t 1949. Sidney Bechet. Souvenirs de la Nouvelle-Orléans, Vogue EPL 7015
CD 1949-52. Trésors Sidney Bechet, Vogue 7432846522
LP 1950. Sidney Bechet, Claude Luter et son Orchestre, Vogue LD 006
LP 1950. Sidney Bechet avec Claude Luter et son Orchestre, Jazz Parade,
Vogue COF 22C
LP 1950. Claude Luter et son Orchestre du Vieux-Colombier, Vogue LD007
LP 1950. Sidney Bechet et l'Orchestre Claude Luter, La Chaux de Fonds,
Vogue COF 24C
LP 1950-51. Sidney Bechet et l'Orchestre Claude Luter, La Chaux de Fonds,
Vogue COF 25A
LP 1951. Sidney Bechet-Claude Luter, Vogue LD 001
LP 1951. Claude Luter et son Orchestre, Vogue LD 511-30
CD 1951 Don Byas, 1951-1952, Classics
1315 (Saratoga Jazz Hounds feat. Don Byas)
LP 1951. Mezz Mezzrow-Claude Luter et son Orchestre, Vogue LD 033
LP 1951. Mezz Mezzrow-Claude Luter et son Orchestre, Vogue LD 518-30
78t 1951. Nelson Williams avec Claude Luter et son Orchestre, Vogue V5126
78t 1951. Nelson Williams avec Claude Luter et son Orchestre, Vogue V5124
LP 1951. Nelson Williams avec Claude Luter et son Orchestre (1 titre),
Vogue LD 105
LP 1951. Sidney Bechet avec Claude Luter et son Orchestre. Pleyel Jazz
Concert, Vogue COF 26A/26B
LP 1969. Guy de Fatto-Jean Bouchety. Abbé Guy de Fatto, Riviera 521 181
LP 1972. Maxim Saury, Jazz Story vol.1, Véga 16328
LP 1972. Christian Morin-Maxim Saury, Rencontre, Président KVP 321
LP 1987. High Society Jazz Band, Lasses Candy, Stomp Off SOS 1166
CD 1987-91. Watergate Seven + One. Une soirée au Petit Journal, vol.2,
Jazztrade 4040
CD 1991. Watergate Seven + One. Une
soirée au Petit Journal, vol.1, Jazztrade 4039
CD 1991. Watergate Seven + One. Une soirée au Petit Journal, vol.3,
Jazztrade 1401
CD 2001. Claude Luter et son Orchestre.
Puisque vous partez en voyage, Blue Moon
Claude Luter et ses Lorientais: Pierre Merlin, Claude Rabanit (cnt), Mowgli Jospin (tb), Claude Luter (cl, comp.), Christian Azzi (p), Claude Philippe (bjo), Michel Pacout (dm), Paris, mercredi 25 juin 1947: «Pimlico», Swing 262 https://www.youtube.com/watch?v=njuSIGuISPU
Claude Luter et ses Lorientais: Pierre Merlin, Claude Rabanit (cnt), Mowgli Jospin (tb), Claude Luter (cl, comp.), Christian Azzi (p), Claude Philippe (bjo), Michel Pacout (dm), Paris, lundi 8 mars 1948: «West End Blues», Pacific LC 90009 https://www.youtube.com/watch?v=mDgADI_BOFg
Michel Pacout trio: Claude Luter (cl), Christian Azzi (p), Michel Pacout (dm), Paris, 28 mai 1948: «One Two Two Blues» https://www.youtube.com/watch?v=XuUsntABurs
Claude Luter Quartet: Claude Luter (cl, comp), Christian Azzi (p), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), Paris, entre les 18 et 24 décembre 1948: «Riz à la Créole», Selmer SV 2971 https://www.youtube.com/watch?v=Nrxbi4PbAgc
Rendez-vous de Juillet, Claude Luter et ses Lorientais: Pierre Merlin, Claude Rabant (cnt), Mowgli Jospin (tb), Claude Luter (cl), Christian Azzi (p), Claude Philippe (bjo), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), Maurice Ronet (figurant), Paris, mai/juin 1949: «Black Bottom Stomp» https://www.youtube.com/watch?v=4ORER0VyEZ4
Sidney Bechet avec Claude Luter et son Orchestre: Pierre Dervaux (tp), Mowgli Jospin (tb), Sidney Bechet (ss), Claude Luter (cl), Christian Azzi (p), Claude Philippe (bjo), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), dialogue entre Bechet et Luter, Paris, 14 octobre 1949: «Buddy Bolden Story», Vogue V5013 https://www.youtube.com/watch?v=X9CJDcMmwCs
Pierre Dervaux (tp), Bernard Zacharias (tb), Sidney Bechet (ss), Claude Luter (tp), Christian Azzi (p), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), Paris, 6 octobre 1950: «Casey Jones» https://www.youtube.com/watch?v=5CR_QSnLYuY
Mezz Mezzrow (cl) avec Claude Luter et son Orchestre: Guy Longnon (tp), Bernard Zacharias (tb) Claude Luter (cl), Christian Azzi (p), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), Paris, 30 octobre 1951: «Black and Blue» https://www.youtube.com/watch?v=ghWj6k2hpfQ
Sidney Bechet (ss) avec Claude Luter (cl) et son Orchestre: Guy Longnon, Claude Rabanit (tp), Bernard Zacharias (tb), Christian Azzi (p), Roland Bianchini (b), Claude Philippe (bjo, g), Moustache Galépidès (dm), La Chaux-de-Fonds, Suisse, 30-31 mai 1952: «Les Oignons» https://www.youtube.com/watch?v=bVOrg2ggwGg
Sidney Bechet (ss) avec Claude Luter et son Orchestre: Guy Longnon (tp), Bernard Zacharias (tb) Claude Luter (cl), Christian Azzi (p), Claude Philippe (bjo), Roland Bianchini (b), Moustache Galépidès (dm), Paris, 18 janvier 1952: «Strike Up the Band», Vogue V5079 https://www.youtube.com/watch?v=l8W3nVgs_zM
High Society Jazz Band: Pierre Merlin (cnt), Danel Barda (tb), Pierre Atlan (cl), Christian Azzi (p), Enzo Mucci (bjo), Frédéric Yzerman (tu), François Cotin (dm), 1986: «Old Fashioned Love»https://www.youtube.com/watch?v=0tz_Q665NTU
The Yellow Dogs: Patrick Artero, Marcel Bornstein (tp), Patrick Bacqueville (tb), Marc Richard (cl), Christian Azzi (p), François Fournet (bjo), Michel Marcheteau (tu), St Raphaël, 1994: «Yellow Dog Blues»https://www.youtube.com/watch?v=xhFRBEMshnI
Carte blanche à Claude Luter: Claude Luter (cl, ss), Benny Vasseur (tb), Christian Azzi (p), Michel Marcheteau (tu), Poumy Arnaud (dm)+ guests: Michel Bonnet, Eric Luter (tp), Jacques Gauthé (cl), Claude Tissendier (as, cl), Marciac, 15 août 1996
https://www.youtube.com/watch?v=Dphzf9v16MQ
Boss Quéraud (tp), Michel Camicas (tb), René Franc (cl, ss), Christian Azzi (p), Jack Sewing (b), Poumy Arnault (dm), Marciac, 3 août 2000: «Royal Garden Blues» https://www.youtube.com/watch?v=nxdhvwrXXU4
Paris Washboard: Daniel Barda (tb), Alain Marquet (cl), Christian Azzi (p), Gérard Bagot (whb), Jazz Cruise on the Baltic Sea, mai 2005: «Just One of Those Things» https://www.youtube.com/watch?v=O0fMpa3i6Go
Sidney Bechet Memory: Marcel Bornstein (tp), Daniel Barda (tb), Olivier Franc (ss), Alain Marquet (cl), Christian Azzi (p), Alphonse Masselier (b), Poumy Arnaud (dm), Luxembourg, 30 mai 2009: «Si tu vois ma mère»
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